« Siècle d’or néerlandais ». C’est vers 1620 que s’installent à Nantes les premiers négociants venus de Hollande. Le pays est alors la première puissance commerciale du monde, dans une période que l’on nomme le « Siècle d’or néerlandais ». Comme la plupart des riches marchands de l'époque, ces commerçants venus du Nord posent leurs valises dans le quartier de la Fosse : ils apprécient la proximité avec le port sur la rive nord de la Loire. Rapidement, leur présence se fait remarquer et le quartier est surnommé la « Hollande ». D'autant que ces marchands préfèrent rester entre eux pour mener leurs transactions.
« place de Hollande ». Quand la Bourse de commerce est créée en 1641 par les négociants nantais alliés aux Espagnols, les Hollandais choisissent d'ailleurs de continuer de se réunir sur une place toute proche, que l’on appelle bientôt « place de Hollande ». Ils y discutent affaires, ils fixent le cours des produits qui les intéressent : blé, vin, sel... « Ils occupent une place si éminente qu’en 1654, ils contrôleraient les trois-quarts du négoce nantais, relate l’historien nantais Alain Croix. Ce dynamisme repose sur une colonie d’un peu plus de 300 personnes à son apogée.»
Déclin. Puis, ces commerçants s’orientent de plus en plus vers la distillation de l’eau-de-vie, le raffinage du sucre et la brasserie, au début des années 1680. Mais la révocation de l’édit de Nantes en 1685 par Louis XIV marque le déclin de la présence des Hollandais, protestants.
Une place en coeur de Loire
La première photo de Nantes
À la proue de l’île Feydeau, au XIXe siècle, la Petite-Hollande permet d’admirer la beauté du quai de la Fosse et de contempler le fleuve. Les immeubles se répondent, de part et d’autre de la Loire, comme ils le feraient sur une place de ville. C’est sans doute la raison pour laquelle elle va être l’un des lieux les plus représentés à Nantes. Elle devient le sujet du premier daguerréotype, procédé primitif de la photographie par lequel l'image était fixée sur une plaque métallique. Il est réalisé à Nantes en 1840 par Jules Forest et conservé aux Musée d’Histoire de Nantes.
Crédit : Archives de Nantes
Des bords de Loire aux comblements du fleuve
La ville continue de s'étendre et, un peu plus loin, la grève de sable fluvial à la pointe ouest de l’île Feydeau est aménagée pour devenir une place. Elle est nommé place des Bains quand s'y installe un établissement de bains publics à partir de 1802. Mais en souvenir des marchands hollandais, cette place est renommée place de la Petite-Hollande en 1820. Fini la rive nord de la Loire : par son déplacement au bout de l’île Feydeau, la « Petite Hollande » devient ainsi une place au cœur du fleuve, la porte d’entrée sur la ville.
Halles. Construit en 1867, le marché couvert de la Petite Hollande remplace l’établissement de bains publics. Il abrite sous ses halles des échoppes. Autour, un quai en hémicycle, donnant accès à une cale, permet les livraisons par voie d'eau.
crédit : Archives de Nantes
Porte d'entrée sur Nantes. Ce premier marché couvert est sans doute né de la présence de la grève qui permet d'accoster et d'une cale qui permet de remonter les marchandises sur la place. Mais il suscite plusieurs plaintes des riverains car, d'une hauteur de près de 13 mètres, les halles rompent leur vue sur la Loire et, selon eux, altèrent la beauté de la place qui forme une porte d'entrée sur Nantes.
Un jardin public. Le site, très actif, est détruit en 1932 pour cause d'insalubrité : il est remplacé par un jardin public imaginé et conçu par l’architecte de la Ville, Étienne Coutan. Le 17 mai 1946, le conseil municipal attribue à ce square de la Petite-Hollande le nom de Jean-Baptiste Daviais, fondateur de la Fédération des amicales laïques de la Loire-Inférieure. Résistant durant la Seconde Guerre mondiale, ce militant associatif rezéen est mort en captivité au camp de concentration de Dachau, le 9 janvier 1945.
Les comblements
Un nouveau paysage urbain. L’activité portuaire y est intense jusqu’au début du XXe siècle. Mais les comblements de la Loire vont bouleverser radicalement le paysage urbain du centre de Nantes (voir ci-contre). Débutés en 1926, ils s’achèvent en 1946 et laissent la place de la Petite-Hollande amputée de son lien à la Loire.
La fin de la "Venise de l'Ouest". L’île Feydeau tout entière disparaît lors de ces travaux d’ampleur inédite, qui bouleversent totalement l’espace fluvial et urbain. Celui-ci s’organisait autour de la place de la Petite-Hollande, désormais rattachée aux rives par des millions de mètres-cubes de sable. La pointe de l’île Gloriette est amputée pour faciliter l’écoulement de la Loire par le bras de la Madeleine après le comblement des deux bras nord du fleuve. La « Venise de l’Ouest » n’est plus tant la présence de l’eau irriguait le cœur de Nantes. En 1935, le square de la Petite-Hollande, imaginé par l’architecte de la Ville Étienne Coutan, vient s’arrimer sur les fondations de l’ancien marché couvert. Offrant ainsi aux Nantais un nouvel espace de promenade.
L'espace gagné sur le fleuve devient une esplanade, baptisée terre-plein de la Petite-Hollande (ou terre-plein de l’île Gloriette). Mais beaucoup de Nantais le désignent encore sous le nom de place de la Petite-Hollande.
L'esplanade de la Petite-Hollande
Le site accueille depuis 1949 le marché hebdomadaire le plus important de Nantes et de sa région, avec plus de 300 commerçants chaque samedi.
Le plus grand marché de l'Ouest. La "Petite-Hollande" s'anime chaque samedi au gré de ses étals. Un marché populaire fréquenté par des milliers de Nantais.
Et demain ? Un grand projet urbain, mené en concertation avec les habitants, doit à terme de nouveau métamorphoser la Petite-Hollande.