Commande, réception des colis, composition des repas et des plats, évolution du poids, intérêt du coaching, suivi par un diététicien indépendant, analyses de sang, difficultés, réussites, conséquences sur ma santé, impact environnemental...
Notre enquête
Comme J'aime : c'est quoi ?
Des repas livrés à domicile pour quatre semaines. Plus précisément, c’est un énorme carton de 23 kilos dans lequel on trouve quatre valisettes (une pour chaque semaine) composées de plats préparés en barquette, de purées et soupes lyophilisées, de céréales, de compotes, d’entremets en poudre, de barres au chocolat protéinées.
Aux menus pré-établis selon un planning bien précis, il faut ajouter du fromage blanc et des fruits. Quatre repas par jour : petit-déjeuner, déjeuner, collation, dîner. "Ce qui est important, c'est le bon assemblage des aliments. Et vous allez voir nos plats sont consistants", annonce la chargée de clientèle lors de la commande...
Après deux mois et 112 plats préparés, je reste perplexe. 30 g de céréales, 300 g de barquette, 50 g de purée en sachet. Consistant ? Pas tellement. Car, Comme J’aime, n'est, ni plus ni moins, qu'un régime dit "hypocalorique". Soit entre 1200 et 1400 calories par jour selon la formule choisie. Rien de nouveau. Ces régimes existent depuis la nuit des temps !
Bon, au départ, ça m’angoisse un peu... Vais-je avoir faim ? Vais-je tenir lors de mes séances de sport et de danse ? Vais-je craquer ? Vais-je me lasser ? A la dernière question, je peux d’ores et déjà vous confier quelle a été ma déception lorsque j’ai reçu le deuxième carton…
La commande
72 kilos pour 1m62. La chargée de clientèle calcule mon indice de masse corporelle (IMC). C'est le rapport du poids (en kg) sur la taille au carré (m2). Résultat : un IMC à 27,4. Je suis en "surpoids" selon l'Organisation mondiale de la santé qui a validé cet outil de calcul. "Et vous voulez perdre combien ?" "Environ sept kilos. Ce qui me ramène à une "normalité pondérale". "Si aujourd’hui on a 95 % de satisfaction clients c’est parce qu’ils obtiennent une perte de poids et qu’ils la stabilisent", assure la téléconseillère. "Pas de restrictions, pas de privations, on mange de tout." Le discours est bien rôdé. "Plus besoin de craquer dans les magasins. Là, vous n’avez pas le souci des courses", enchaîne-t-elle. Nous démontrerons que ce n'est pas tout à fait vrai. "Vous avez le suivi d’un coach diététique, on ne vous laisse pas toute seule." Lorsque j’évoque ma crainte des 1350 calories par jour : "Ne vous inquiétez pas ! Tout a été étudié par des nutritionnistes."
Au bout d'une vingtaine de minutes, affaire conclue pour deux mois de programme. Si cette chargée de clientèle a su se montrer persuasive, sympathique, je note toutefois une erreur à faire bondir tous les médecins du monde : "Vous pouvez ajouter du sel si vous trouvez qu’il n’y en a pas assez dans les plats", affirme-t-elle. Niveau conseil, on a déjà entendu mieux…
Perd-on du poids ?
"Oui, vous allez perdre du poids", prévient Anne-Laure Meunier*, nutritionniste-diététicienne à Paris, spécialisée dans les comportements alimentaires, qui a accepté de suivre mon évolution durant ces deux mois de test.
"C’est vrai que pour perdre du poids, il faut faire un régime hypocalorique. Mais sur le long terme, on reprend autant, voire le double", alerte-t-elle. Je fonds dès la première semaine : trois kilos en moins. La raison ? La semaine Turbo +. Exit l’entremet du midi et le soir n’est composé que du plat cuisiné sans la soupe. Les semaines suivantes, je mincis mais de façon plus modérée et plus progressive.
A mi-chemin du régime, après passage sur la balance impédancemètre (principe par lequel un faible courant électrique traverse le corps et qui calcule alors le taux de graisse, de muscle, et d'eau) au cabinet d'Anne-Laure Meunier, nous constatons une perte de masse grasse. "C’est très bien", reconnaît la diététicienne.
Par contre, un élément l’interpelle : j'ai perdu 700 g de masse musculaire alors que je n'ai pas séché mes six à huit heures de sport par semaine. Pour elle, l’explication peut être un apport en protéine légèrement insuffisant malgré la barre de céréales hyperprotéinée et les fromages blancs. Il faut au minimum 0,8 g à 1,2 g de protéine par jour et par kilo. Soit pour un poids de 65,3 kg (mon poids de forme selon IMC), 52 g de protéines minimum par jour. "Selon mes calculs, par rapport à tout ce que vous mangez, on est légèrement en-dessous", analyse la spécialiste.
Au final, j'ai perdu : 5,9 kilos. L'objectif des 7 kilos n'est pas tout à fait atteint mais presque.
Allez, avouez-le. Vous vous dites, "je suis sûr qu'elle a craqué parfois" ! Effectivement je n'ai pas dit non à un verre de Martini avec des confrères après une journée de boulot, à une coupe de champagne avec mes parents, à deux churros un dimanche après-midi au stand d'une fête foraine, à un repas d’anniversaire, à une soirée chez des amis, à un plateau sushis avec ma petite sœur et même à un week-end complet sans plat Comme J'aime... Mais, honnêtement, pas d'écart excessif.
"Si c’est trop drastique, c’est l’échec assuré sur le long terme. Une perte de poids saine et pérenne, c’est maximum 500 g par semaine", précise Anne-Laure Meunier. Soit environ deux kilos par mois. "Et sans perte de masse musculaire ! "
Combien ça coûte ?
Comptez pour la formule "équilibre" 509 euros pour un mois, 489 euros par mois si vous suivez le programme deux mois, 389 euros par mois si vous souscrivez pour huit mois. Nous avons opté pour deux mois soit un total de 978 euros. Cela représente 17,40 euros par jour sur 28 jours. Si, dans ce prix, il faut inclure, entre autres, la livraison et le "coaching", le coût des repas est relativement élevé.
"Vous n’avez pas de courses à faire", avait argumenté la chargée de clientèle lors de la souscription au régime. Pourtant, je me suis rendue à de nombreuses reprises en supermarché. Eh oui, les fruits, les légumes, les fromages bancs (ou équivalents), conseillés par le programme, ne sont pas fournis ! Mais aussi parce que je n'ai pas arrêté de me laver, de faire des lessives, de nettoyer mon appartement et de remplir le frigo pour mes proches !
Alors voilà, au bout de deux mois, la facture initiale s'est alourdie : 23/10 Auchan = 21, 15 euros ; 31/10 Auchan = 9,79 euros ; 2/11 Auchan = 23,34 euros ; 10/11 Cora = 2,22 euros ; 14/11 Cora = 24,95 euros ; 19/11 Cora = 16,92 euros ; 26/11 Auchan = 33,12 euros ; 1/12 Auchan = 27,4 euros.
Soit un total de 158,87 euros en fruits, légumes et fromages blancs.
"La quasi totalité de nos plats contiennent des légumes, ils ne sont donc pas obligatoires. Vous en ajoutez si vous le souhaitez comme indiqué dans la plaquette d'information", répond Mathilde Canetti, la directrice générale de Comme J'aime et co-fondatrice du concept avec son père Bernard Canetti. J'ai pourtant identifié de nombreux plats sans légumes : parmentier de poisson, spaghetti à la bolognaise, poulet au curry, merlu à l'oseille, hachis parmentier, filet mignon et purée de pomme de terre...
"Mais, pour nous, il n'y a quasiment pas de courses à faire. L'essentiel des repas est livré à la maison." Et sur les tentations au gré des rayons ? "Je maintiens qu'il y a peu de tentation dans la mesure où, pour vous, les courses sont faites. Il n'y a pas besoin d'y aller toutes les semaines."
De quoi est réellement composée mon assiette ?
Couscous, chili con carne, poisson, poulet, riz, raviolis à la tomate… Pas de la grande cuisine, mais rien d’immangeable. "On dirait du plâtre ta purée", lancent mes collègues quand je sors mon plat du micro-ondes au bureau au moment du dîner. En même temps, on ne peut pas s’attendre à une recette Robuchon après avoir jeté un sachet de pomme de terre déshydratée dans de l’eau bouillante...
Vous n’aimez pas le riz ? Alors, Comme J’aime n’est pas fait pour vous. En termes d’aliments, ceux que l’on retrouve le plus (calcul sur 56 repas : soit 27 jours) sont le riz, les pommes de terre mais aussi la volaille (dinde, poulet), viande qui se limite à quatre ou cinq touts petits morceaux au fond de la barquette (oui, oui, je les ai comptés). 31 repas sur 56 sont composés de viande (100 % française) contre 6 de poisson.
Pas pour des raisons de coûts mais "parce que le poisson n'est pas ce qui apporte le plus de satisfaction à nos clients", note Mathilde Canetti. Plus globalement, on constate qu’il y a peu voire pas du tout de produits dits "nobles". Oubliez le riz complet, oubliez le beau pavé de saumon ou le filet de bœuf. "Et vous ne mangez même pas du poulet", avertit Anne-Laure Meunier. "Vous mangez de la viande de poulet !" C’est-à-dire ? "Un morceau de poulet auquel on a adjoint de l’eau et de l’amidon pour lui donner de la texture, du volume." Ce procédé est très utilisé dans l’industrie agroalimentaire. Et c’est là où le bât blesse... Ces plats Comme J'aime en seraient-ils issus ?
Direction les supermarchés
En effet, à y regarder de plus près, on s’aperçoit que les barquettes Comme J'aime ressemblent étrangement aux plats préparés, toutes marques confondues, du rayon épicerie des supermarchés...
Pour en avoir le cœur net, je me suis rendue chez Auchan, Carrefour, Leclerc, Cora, Monoprix et j'ai relevé tous les codes usines des plats préparés pour comparer la provenance des produits avec les plats Comme J'aime.
Résultat : les barquettes Comme J’aime sortent des mêmes usines que celles où sont cuisinés les plats de marque "La Cuisine d’Océane", "Daucy", "Gaylor Hauser" et un très grand nombre de marques distributeurs ("Côté table" pour Leclerc, "Les Brasseries" pour Carrefour etc.).
"Le code emballeur est spécifique à une usine. Si ce code est le même sur des emballages de marques différentes cela veut dire que tous ces produits sortent de la même usine", certifie Christophe Brusset*, ancien ingénieur de l’industrie agroalimentaire et aujourd’hui lanceur d’alerte.
Toutes contactées, les usines en question, n'ont pas souhaité s'exprimer sur leur collaboration avec la société Comme J'aime - le secret professionnel - mais aucune n'a démenti compter parmi ses clients l'entreprise de Mathilde et Bernard Canetti.
Mathilde Canetti, directrice générale ne dément pas non plus. Mais elle précise : "Toutes les recettes sont exclusives. L'usine peut faire un bœuf bourguignon pour d'autres marques mais ça ne sera pas exactement le même que Comme J'aime."
Comparatif avec les plats de supermarchés : le test
Nous avons effectué des tests comparatifs comme, par exemple, sur le "Poulet rôti, purée de pomme de terre". Nous trouvons ce même plat, même code emballeur, en supermarché sous différentes marques : "La Cuisine d’Océane" à 3,29 euros (Monoprix) ou "Les Brasseries" à 2,81 euros (Carrefour). Ce "Poulet rôti, purée de pomme de terre" sort de la même usine Le Vif argent (Maison Gendreau) située à Saint-Gilles-Croix-de-Vie en Vendée. Rappelons que le coût du régime Comme J'aime sur une journée complète est de 17 euros.
D'autres plats tels que le poulet basquaise, les torsades au saumon, la saucisse-purée, les spaghettis à la bolognaise ("retirées car elles n’obtenaient pas la satisfaction des clients" selon la directrice générale de Comme J'aime mais toujours référencées au 11 janvier dans le catalogue des menus sur le site internet Comme J'aime), ont été testés.
Conclusion : en termes de composition, d'aliments et surtout de goût, ces plats achetés en supermarché, sont très similaires aux plats Comme J'aime.
Une des comparaisons les plus flagrantes : les raviolis. "Pour moi ce n'est pas possible que ce soit les mêmes choses. Il faut qu'on regarde", signale Mathilde Canetti.
A valeurs nutritionnelles, compositions et goût assez identiques, ne pourrait-on pas se dire qu'il suffit d'aller acheter ces plats et faire son programme toute seule. Techniquement parlant : c'est faisable. On achète deux plats de supermarché par jour pour le déjeuner et le dîner, des céréales si possibles complètes pour le petit-déjeuner, des fromages blancs, des fruits, des légumes et on prépare une soupe maison.
"C'est faux ! Arrêtez de croire que quelqu'un qui a vingt kilos à perdre va aller dans un supermarché pour moins cher, prendre ces plats et mincir. Il a besoin de cadre, de discipline. On gère au quotidien des milliers de clients qui ont 15, 20 kilos à perdre, voire plus. Je ne veux pas qu'on leur fasse penser qu'il est facile de perdre du poids et qu'il suffit d'aller piocher une barquette en supermarché pour réussir. Comme J'aime, ce n'est pas qu'un bœuf bourguignon. C'est une méthode complète, une discipline via les menus et des rendez-vous coaching", réagit Mathilde Canetti.
Une gamme de produits "naturels, sains et de qualité"
Comme J’aime vante des "produits naturels, sains et de qualité". S’il y a un point positif à noter dans la composition des plats préparés ce sont les teneurs très modérées en graisses, sucres et sel. Mais, malheureusement, je n’ai pas eu l’impression de consommer des produits "sains et naturels". Nous l'avons démontré : les plats de ce régime sortent des usines de l'industrie agroalimentaire et sont donc très transformés.
"Les plats préparés sont des aliments ultra-transformés, classés 4 dans la classification NOVA (degré de transformation de 1 à 4). Ce sont des aliments à éviter et que l'on ne devrait consommer que très rarement pour dépanner. Les études Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) de 2018 montrent qu'une augmentation de la consommation d'aliments ultra-transformés de 10 % augmente votre risque de développer un cancer de 12 %. Ces produits ont perdu leur effet matrice, n'ont presque plus de vitamines, d'antioxydants naturels et peu de fibres. Et souvent un tas d'additifs", développe Christophe Brusset, l'ex-ingénieur dans l'agroalimentaire.
Nous les avons tous relevés sur les deux mois de programme et, à quelques exceptions près, - par exemple "les pennes à la tomate" -, tous les plats Comme J'aime en contiennent. "L’additif est une substance incorporée à un aliment pour améliorer son aspect, sa saveur, sa texture ou allonger sa durée de conservation", précise Anne-Laure Denans, docteur en pharmacie*. Ils n’ont aucune valeur nutritive. Plus de 300 additifs alimentaires sont autorisés dans l’Union européenne. "90 d’entre eux pourraient potentiellement poser problème pour notre santé, soit un sur quatre !", constate la spécialiste après avoir étudié plus de 200 publications scientifiques. "Certains pourraient contribuer au développement de pathologies lourdes comme le diabète de type 2, les troubles neurologiques, les maladies auto-immunes ou encore le cancer…".
De plus, si, à ce jour, les industriels ont l’obligation de les mentionner dans la composition dans leurs produits, ils n’ont aucune obligation d’en préciser la quantité. Ainsi, nous, consommateurs, ne pouvons calculer le cumul d’additifs sur une journée et vérifier si nous n’avons pas dépassé "la dose journalière admissible". Elle correspond à la dose maximale d’une substance (exprimée en mg par kg de poids corporel et par jour) à laquelle on peut être exposé de façon répétée tout au long de la vie sans risque pour la santé. Ainsi, "plus on perd du poids, plus le degré d’exposition aux additifs augmente", constate Anne-Laure Meunier.
Sans parler de ces industriels qui, parce que les clients sont de plus en plus méfiants, ne signalent plus les formules type "E..." mais utilisent les noms chimiques. Par exemple "glutamate de sodium" pour "E621" un exhausteur de goût et additif ultra-controversé, remplacé dans la liste des ingrédients par l'appellation "extrait de levure". Ce glutamate, que l’on a trouvé dans plusieurs plats Comme J’aime, favoriserait, selon des études scientifiques récentes (1), l’obésité, l’hypertension, l’hyperactivité, le diabète, s’il est consommé de façon excessive.
Mathilde Canetti, directrice générale de Comme J'aime : "Nous avons une gamme depuis le 1er novembre sans conservateurs, sans colorants, sans arômes artificiels."
Effectivement dans mon colis livré le 16 novembre, j'ai reçu certains produits de cette gamme mais il reste toujours une majorité de plats avec colorants et conservateurs.
"A partir du 1er avril 2019, nous ferons tout pour qu'il n'y ait quasiment plus d'additifs dans nos plats", indique Mathilde Canetti.
Les industriels fournissent-ils un effort pour réduire la présence des additifs ?
Christophe Brusset : "Industriels et distributeurs veulent rendre les listes d'ingrédients plus présentables en enlevant des additifs et obtenir de meilleurs scores nutritionnels. Mais il n'y a aucune réelle prise de conscience et altruisme de leur part. C'est simplement une démarche marketing. Cela se fait sous la pression des consommateurs qui utilisent des applications comme "Yuka" et "Openfoodfacts", des associations comme Foodwatch qui demandent la généralisation du Nutriscore, des nutritionnistes et des personnes comme moi qui dénoncent les ravages de la malbouffe."
Le suivi : le coaching
Une dizaine de jours après le début du programme, premier rendez-vous téléphonique avec Margaux. Elle, c'est mon coach. La personne qui doit suivre mes évolutions durant toute la durée du régime et après.
"Chez Comme J'aime, 70 % des coachs sont diplômés en diététique, 30 % sont des personnes choisies pour leur empathie et formées sur les aspects de la diététique", précise Mathilde Canetti.
Après m'avoir félicitée pour les trois kilos perdus, nous faisons un point d'étape. Je lui fais part de mes crampes d’estomac le soir avant de m'endormir (j’ai faim). Son conseil : "Mangez un œuf, un yaourt, un fromage blanc". Des protéines donc. Par contre, sur la question de l’assaisonnement, elle est catégorique : le sel "c’est à éviter". Nous fixons un deuxième rendez-vous téléphonique. Entre-temps, et parce que je dois respecter les délais comme indiqué par la téléconseillère lors de la souscription au programme, je résilie mon contrat de deux mois.
La résiliation
Je contacte le service clients car j'ai souscrit à "un programme d'une durée indéterminée avec une durée minimale, choisie par le client, (en l'espèce deux mois) comprise entre un et huit mois. Ainsi, si je ne veux pas que Comme J'aime me livre un troisième mois et prélève sur mon compte bancaire une nouvelle mensualité, je dois les en avertir. "Au terme de la période minimale choisie, le client est libre de demander l'arrêt du programme à tout moment, en respectant un délai minimum de cinq jours ouvrables avant la date d'expédition du colis suivant". Et là, surprise, une hôtesse me répond mais la conversation coupe après lui avoir expliqué que je souhaitais mettre un terme au contrat. Deuxième essai, même scénario. Troisième essai... Avant d’entrer dans le vif, j’interpelle mon interlocutrice : -"Je viens d’appeler deux fois, deux fois où l'on m’a raccroché au nez". -"Ce sont des bugs informatiques." "Oui, sans doute un problème technique", atteste Mathilde Canetti.
J'indique au service clients que je souhaite stopper le programme. La commerciale me conseille alors de poursuivre un troisième mois... Ah bon ? Mais pour quoi faire ? "Pour la phase de stabilisation", explique-t-elle. Je suis étonnée. Personne, ni la chargée de clientèle lors de la souscription au régime, ni la coach au premier rendez-vous téléphonique, ne m'avait précisé que cette phase dite de "stabilisation" était en réalité un mois supplémentaire aux deux fixés au départ. Astuce marketing ? En tout cas, je n'avais absolument pas prévu de suivre, et surtout souscrire, un mois supplémentaire. Je décline donc l'offre faite par la commerciale même si cette dernière me propose des facilités de paiement...
Pour cette phase de stabilisation, qui a pour principe la réintroduction de certains aliments comme le pain, puis une alternance entre barquettes et des repas faits maison, je devrai me contenter de quelques instructions livrées sur des feuilles A4 reçues par courriel. "Donc, là vous ne me rappellerez plus ?" "Non." J'aurais dû regarder les petites lignes... Les conditions générales de vente sont claires : "Après résiliation, Comme J'aime s'engage à cesser immédiatement toute expédition, le soutien du coach prenant fin concomitamment."
A ce stade, j’ai le sentiment d’être relâchée dans la nature, livrée à moi-même, sans trop savoir quelle attitude adopter… "La réalité c'est que nous avons beaucoup de clients qui continuent à être coachés après avoir arrêté. On est beaucoup plus souple que nos conditions générales de vente. Je pense que c'est adapté en fonction de chaque client. La stabilisation normalement c'est obligatoire dans le programme lorsque l'on perd plus de huit-neuf kilos. Or, dans votre cas, on s'est peut-être dit que vous n'aviez que sept kilos à perdre donc une perte possible en un mois et demi et que les quinze derniers jours seraient utilisés pour la phase de stabilisation", justifie Mathilde Canetti.
Certes, mais alors pourquoi personne ne m'a informée que ces quinze derniers jours de programme serviraient à la stabilisation ? Je n'en saurai pas plus.
"Dès que les clients ont perdu huit-dix kilos, c'est très difficile de les convaincre de faire une stabilisation avec ou sans colis ! Nos équipes sont formées pour expliquer aux clients pourquoi c'est important et comment ça fonctionne", signale Mathilde Canetti. Pour ma part, je pense ne pas avoir eu les informations en ce sens.
Mais peut-être, parce que, comme le rappelle Mathilde Canetti : "Les clients ne sont pas conscients de l'importance de la phase de stabilisation." Et la directrice générale de reconnaître : "Il y a peut-être un peu plus de pédagogie à faire." Ou alors de préciser, dès le départ, que c'est tout simplement un colis supplémentaire...
Mathilde Canetti révèle que la société va mettre en place "à partir de février-mars 2019" une application mobile et un programme spécifique "pour accompagner les clients après l'amincissement et s'assurer qu'il n'y ait pas de reprise de poids".
Mon ressenti
Il est clair que le concept Comme J'aime (menus hypocaloriques) n’est pas aussi drastique et restrictif que certains régimes... Je pense notamment à la méthode Dukan où l'alimentation est réduite à l'apport quasi exclusif de protéines. Cependant, on ne va pas se mentir, les premières semaines ont été difficiles avec une sensation de faim très présente. Ensuite, tout au long du programme, j’aurais tout donné pour manger un morceau de fromage, du VRAI fromage, pas celui à 8 % de matières grasses. Un peu plus de pain aussi.
Je dois dire, quel plaisir d’être invitée à dîner chez ma meilleure amie à mi-chemin du régime ("si vous avez un événement, un restaurant faites-le, ça vous aide à garder votre quotidien"). Au menu : salade de chèvre chaud sur pain grillé et bœuf bourguignon maison. Mes papilles en salivent encore.
Sur un plan psychologique : pas de baisse de moral mais, déjà au bout d'un mois, un goût de lassitude... A l'ouverture du deuxième colis, je pense alors aux personnes qui, pour la majorité, sont des clients qui suivent le programme entre six à huit mois, car je trouve exactement les mêmes plats que dans le premier colis.
"On est dans une recherche permanente d'évolution. On travaille à d'autres recettes", indique Mathilde Canetti.
Les autres difficultés
Sur un plan physiologique : pas de baisse d'énergie au cours des journées mais une grosse perte de carburant lors des séances de sport.
Sur un plan social : finalement, on en vient à éviter les pots entre collègues au travail ou à décliner des invitations au restaurant ou chez des amis car, si on ne nous interdit pas ces moments-là, on se dit qu'ils peuvent influer sur les résultats.
"Ça, c’est le début d’un trouble du comportement alimentaire !", s’alarme Anne-Laure Meunier, nutritionniste-diététicienne. Elle explique : "Pour x raisons, j’ai fait un régime qui m’a imposé des règles. J’ai ressenti un bénéfice et pour les retrouver, je vais me refixer des règles. Je vais rentrer dans un phénomène de restriction cognitive, c’est-à-dire contrôler mon alimentation. Je vais commencer à qualifier certains aliments de tabous ou d’obligatoires, à décliner des invitations par peur de reprise de poids."
Autre souci pour la spécialiste : "Avec ce type de programme standardisé où tous les menus sont préparés d’avance, calibrés à la barquette et qu’il n’y a qu’à réchauffer au micro-ondes, on n’apprend pas grand-chose."
"Faux", répond Mathilde Canetti. "La première chose que l'on apprend, c'est la discipline avec quatre repas par jour. Le client type qui arrive chez nous est assez désorganisé d'un point de vue alimentaire. Par exemple, il saute le petit-déjeuner. La deuxième chose que l'on apprend c'est le portionage et ne pas servir en trop grande quantité. Un plat de 300 g tel qu'il est proportionné ce sont les bonnes quantités. Et le coach est là pour gérer tout ce qui a trait aux situations particulières : écarts à l'occasion d'un repas avec des amis, vacances, coup de blues..."
"Nous avons aussi l’impression qu’aujourd’hui nous n’avons pas d’autre choix que de manger du tout préparé, transformé, sans ingrédients bruts. C’est dramatique", déplore Anne-Laure Meunier.
"Il y a zéro équation intéressante là-dedans même si, d’un point de vue strictement nutritionnel, il n'y a rien de choquant."
Les conséquence sur ma santé
Ce régime prend-il en compte la notion de "métabolisme de base" qui est l’énergie nécessaire pour assurer toutes les fonctions essentielles à l’organisme, l’énergie en dessous de laquelle il ne faut jamais descendre ? "Non", signale Anne-Laure Meunier. "Car, selon votre profil, votre métabolisme de base est de 1460 kcal par jour (ndlr : il est calculé avec la formule de Black et al. 1996). Le problème est que le total de vos apports quotidiens est de moins de 1400 kcal par jour avec les collations, fruits, fromages blancs prévus par le programme...
On est donc en dessous du métabolisme de base ; ceci n’est pas une bonne chose car on met sa santé en danger, on perturbe le métabolisme et c'est la voie royale pour l'effet yoyo", développe Anne-Laure Meunier. "Il y a donc un apport en énergie à faire mais aussi un apport en nutriments à effectuer pour éviter les déficits." Des nutriments principalement apportés grâce aux légumes non fournis par Comme J'aime et "non obligatoires" comme l'a souligné Mathilde Canetti interrogée sur la question du coût du régime.
"Les données ont, dans l'ensemble, peu évolué", observe le médecin biologiste du laboratoire de biologie médicale où j'ai effectué la prise de sang. Il n'y a pas eu de carence. "Les variations significatives ici concernent les triglycérides et le mauvais cholestérol", indique mon médecin traitant. Après deux mois de programme, j'ai moins de "mauvais cholestérol" et de triglycérides.
Ai-je fais tout ça pour rien ?
"Ce régime-là donne les mêmes résultats que tous les autres régimes. Les gens maigrissent pendant six mois, un an. Et deux, trois ans après, ils ont tous regrossi", dénonce le docteur Jean-Philippe Zermati*, nutritionniste et psychothérapeute, président d'honneur du Groupe de réflexion sur l'obésité et le surpoids (GROS).
En effet, le rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation de l’environnement et du travail (Anses), "Évaluation des risques liés aux pratiques alimentaires d’amaigrissement", paru en novembre 2010, commandé par le ministère de la Santé, établit que la majorité des régimes (Cohen, Dukan, Fricker, Weight Watchers…) sont, dans leur ensemble, inefficaces sur le long terme et nuisibles pour la santé physique et mentale. Ils conduisent aussi à des carences en nutriments et micro-nutriments, des troubles du comportement alimentaire.
Jean-Philippe Zermati, nutritionniste et psychothérapeute : "Plus de 90% des personnes reprennent le poids perdu sur des périodes d’évaluation allant de deux à cinq ans."
Mathilde Canetti, directrice générale de Comme J'aime, indique qu'aucune étude n'a été faite sur l'après Comme J'aime. "Pourquoi ? Parce que nous n'avons pas encore assez de recul. Nous avons commencé à convaincre de très nombreux clients depuis deux ans. Avec les outils prochainement mis en place, l'application mobile et les rendez-vous téléphoniques, nous pourrons évaluer l'après Comme J'aime."
Mais elle le répète : "Nous ne sommes pas une méthode miracle. Si vous reprenez vos mauvaises habitudes, il peut y avoir un risque de reprise de poids. On redonne de bons principes et de bonnes bases au travers des séances de coaching."
Le rapport de l'Anses alerte aussi sur les conséquences des efforts d’amaigrissement consistant à modifier la nature et la quantité d’aliments consommés, c'est-à-dire les effets de la restriction cognitive : troubles du comportement alimentaire, baisse à terme de l’estime de soi, dépression, prise de poids à terme... Et les régimes équilibrés induisent tout autant la restriction cognitive que les autres formes de régimes.
En effet, "le point commun de tous ces régimes, y compris Comme J’aime, c’est le contrôle mental du comportement alimentaire. Ce contrôle on ne peut pas le maintenir dans la durée. C’est impossible. Au bout d’un moment, il se relâche et disparaît. C’est physiologiquement infaisable", note le docteur Jean-Philippe Zermati. De plus, dans les cas d’obésité sévère, "maladie chronique multifactorielles", "sa prise en charge nécessite une démarche interdisciplinaire avec nutritionniste, endocrinologue, diététicien, psychologue etc.", selon le rapport de l’Anses*. "Je suis d'accord. On peut avoir ce type de prise en charge. Je dirais que ça dépend de chacun, on fait le choix d'aller chez Comme J'aime ou de consulter un médecin nutritionniste", souligne Mathilde Canetti.
Comme j'aime et l'environnement...
Dans le livret d'informations reçu dans le premier colis, aucun encart sur la gestion des déchets Comme J'aime...
Nous trouvons sur les emballages (excepté la barquette en plastique seul) le logo "Point vert" qui signifie que le producteur adhère au processus de valorisation des emballages. Il paie une contribution aux organismes spécialisés tel que Eco-Emballages. Mais ce sigle ne veut pas forcément dire que le produit est fabriqué avec des matières recyclées ou qu’il soit recyclable.
Nous trouvons, par contre, sur le carton principal et les valisettes de couleur ce logo "Point vert" et le logo "Triman". Il relève d’une obligation légale et réglementaire pour les produits pouvant faire l’objet d’un recyclage. Il indique au consommateur que le produit est associé à une consigne de tri. Autrement dit : il est préférable de trier ce produit pour qu’il soit ensuite recyclé.
Quid des barquettes en plastique ?
Les barquettes en plastique disposent du symbole recyclage "5 PP - pour PolyPropylène". Ce plastique "PP" est utilisé essentiellement dans l’industrie automobile et dans l’industrie alimentaire.
"Nous avons constaté que la plupart de nos clients ré-utilisent nos barquettes car elles donnent les bonnes portions. Nous les invitons à les nettoyer et à les mettre au recyclage", développe Mathilde Canetti.
Problème : ce type de plastique "5 PP" n'est actuellement pas recyclable en dehors de l’industrie. -"Et vous les invitez comment vos clients ?" -"On leur dit", certifie-t-elle. Personnellement, je n'ai eu aucune information en ce sens sauf à scruter les emballages à la loupe. "Le recyclage et l'environnement de manière générale, nous en sommes soucieux. Pour les barquettes, un de nos fabricants, nous a présenté récemment de nouveaux types de barquettes sans plastique." Mais "rien n'est validé". "Ce sont des sujets sur lesquels on travaille."
Et de conclure : "C'est vrai que nos confrères proposent plus de vrac. On estime que c'est moins pratique pour le client." Mais bien plus respectueux de l'environnement.
Format long réalisé par Charlotte Overney
Photos et vidéos Charlotte Overney, Nino Subiaz
*Anne-Laure Meunier, nutritionniste-diététicienne à Paris, spécialiste des comportements alimentaires, est co-fondatrice et membre du réseau SmartDiet, un service de consultations par visioconférence. Perte de poids, prise de poids, sportif, femme enceinte, végétarien, intolérant et allergique alimentaires, senior, trouble du comportement alimentaire, diabète, hypertension artérielle, cholestérol, maladie cardio vasculaire : les diététiciens-nutritionnistes diplômés du réseau SmartDiet accompagnent les patients en téléconsultation à leur domicile ou sur leur lieu de travail (pour des horaires plus flexibles) en rendez-vous individuel ou lors d'interventions collectives comme des ateliers, des challenges...
*Mathilde Canetti, directrice générale de Comme J'aime, société créée en 2010, et qui emploie aujourd'hui plus de 300 personnes en France.
*Jean-Christophe Brusset, ancien ingénieur et dirigeant au sein de groupes internationaux de l'agroalimentaire, et aujourd’hui lanceur d’alerte. Auteur de "Vous êtes fous d'avaler ça !" et "Et maintenant on mange quoi ?" (éd. Flammarion).
*Anne-Laure Denans, docteur en pharmacie, experte en nutrition. Auteur de "Le nouveau guide des additifs" (éd. Thierry Souccar).
*Docteur Jean-Philippe Zermati, nutritionniste et psychothérapeute, président d'honneur du Groupe de réflexion sur l'obésité et le surpoids (GROS). Auteur de "Maigrir sans régime" (éd. Odile Jacob).
(1) Thèse d’Anaïs Deppenweiler "Le glutamate monosodique comme exhausteur de goût : confiance ou méfiance", Université Victor-Segalen Bordeaux 2, UFR sciences pharmaceutiques.