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Wizpaper, la papeterie qui renaît de ses cendres Redynamisation de l’industrie dans les territoires

Dans les territoires, l'État soutient activement le développement économique. Dans ce cadre, les entreprises peuvent bénéficier de la prime d’aménagement du territoire (PAT), que gère le CGET. C'est le cas de Wizpaper, qui a reçu 700 000 euros d'aide de l’État pour accompagner son projet de reprise d'un site industriel fermé depuis quatre ans.

En 2014, la petite ville de Wizernes avait vu l’une de ses deux papeteries mettre la clé sous la porte. Un choc pour cette commune du Pas-de-Calais et les 307 salariés licenciés. En 2018, une nouvelle activité papetière renaît avec l’appui du CGET et des collectivités locales. Wizpaper produit désormais 160 t de papier ondulé par jour. Une bouffée d’air pour le territoire.

700 000 euros de prime d’aménagement du territoire accordés à Wizpaper, l’an dernier. C’est l’un des 22 projets retenus, en 2018, pour bénéficier de cette aide publique à l’investissement.

Le renouveau d'une industrie historique

Entrepreneur du Pas-de-Calais, Henri Breban est dans le papier depuis toujours. En 2017, avec un investisseur finlandais, le chef d’entreprise se lance dans la reprise de la papeterie Arjowiggins, située sur un site industriel vieux de plus de 180 ans. Cette dernière, grand papetier français sur le déclin, a fermé les portes de son usine du Pas-de-Calais, provoquant 307 licenciements secs. Un désastre pour Wizernes, petite commune de 3 400 habitants…

Mais, le partenaire Finlandais jette l’éponge. Qu’à cela ne tienne ! Henri Breban ajuste le projet et, à 64 ans, acquiert l’usine avec deux de ses enfants : sa fille, Perrine Geoffroy, responsable DRH du groupe Express Packaging, et l’un de ses fils, Édouard, qui dirige Wizpaper. Coût de l'opération : deux millions d’euros. Une reprise soutenue financièrement par les collectivités territoriales et l’État. On est alors en 2018 ; le site industriel est fermé depuis quatre ans.

Coût de l'opération : 2 millions d’euros.
Les représentants des collectivités locales et de l'État ont visité l'usine qui, aujourd'hui, emploie 80 salariés et produit 160 t de bobines de papier ondulé par jour.
État, collectivités et industriels soudés autour d’un projet local

Pour réaliser ce solide projet de réindustrialisation sur la friche laissée par l’ancien papetier, l’État a donc accordé à la jeune entreprise 700 000 euros de prime d’aménagement du territoire, en novembre 2018. Une aide octroyée en contrepartie de l’engagement de l’entrepreneur de créer des emplois : « Nous avons démarré notre activité avec seulement 15 personnes. Aujourd’hui, Wizpaper compte 80 salariés, quasiment tous des anciens d’Arjo, plutôt jeunes, et qui se sont bien adaptés à notre nouvelle production. À terme, nous envisageons 120 emplois », indique l’industriel.

De leurs côtés, la communauté d’agglomération du pays de Saint-Omer (Capso) lui a accordé 900 000 euros et la région Hauts-de-France, 1,3 million d’euros pour accompagner la formation des employés. L’ensemble de ces aides publiques a contribué à soutenir ce projet et à convaincre les banques de son sérieux.

Objectif en 2020 : 120 emplois, au total, et 600 t par jour

La première bobine de 15 t est sortie de Wizpaper le 17 mai dernier 2019… à 17 h 08 précise !

Symbole de la reprise d’activité, elle a été fêtée par les sirènes de l’usine que les ouvriers ont actionnée pour marquer l’événement. Une renaissance après quatre ans de fermeture, sans dégradation du site, et de chômage pour nombre d’entre eux.

Un outil de production et un savoir-faire local sauvegardés

Wizpaper fait partie du tissu industriel très présent dans le Pas-de-Calais. Situé sur l’un des 144 « Territoires d’industrie » du programme national de réindustrialisation, « Wizpaper démontre qu’en matière d’emploi et d’activité, on peut faire quelque chose localement. Certes, nous avons des difficultés au niveau de la formation et de l’image négative de l’industrie auprès des jeunes, et aussi avec les banques. Mais, venant d’un entrepreneur local, ce projet industriel avait du sens pour les élus et les ouvriers, constate Henri Breban. Dans le territoire, nous avons reçu beaucoup de soutiens de la part des collectivités locales, de la Région, des services de l’État… Tout un monde s’est soudé autour de notre projet pour que l’on démarre dans les meilleures conditions possibles. »

Forte de cet appui, une toute nouvelle activité – la production de papier pour ondulé – a donc démarré, début 2019. « Nous avons relancé la machine avec des anciens d’Arjo qui connaissaient bien le matériel, son fonctionnement, les pièces de rechange… Les salariés avaient parfaitement arrêté l’usine lors de la fermeture, ce qui a permis un redémarrage plus rapide qu’annoncé, expose le chef d’entreprise. Sans leurs compétences et leur savoir-faire, sans ce matériel préservé (une machine à papier neuve coûte 150 millions d’euros), Wizpaper n’aurait jamais pu démarrer et produire aussi vite. Après quatre mois de révision et de remise en route, les ouvriers ont appuyé sur le bouton, et c’était reparti ! »

un contexte économique favorable

Le contexte est favorable : le développement de l’e-commerce nécessite de l’emballage et la fin du tout plastique est propice au carton. L’activité s’inscrit dans une logique d’économie circulaire. « Notre matériel permet de produire un papier de fin grammage à partir de la récupération de vieux cartons. C’est un atout en termes de performance environnementale et financière, car nous consommons moins de matières premières, souligne l’industriel. De plus, la réduction du poids diminue le coût de transport, et nos clients – en France, Belgique, Grande-Bretagne, Espagne… – ont besoin d’acheter moins de tonnages. »

Les projets de l’entreprise familiale sont ambitieux : passer à 600 t de production, acquérir une onduleuse (machine à six millions d’euros) pour lancer un nouveau produit, en mai 2020, et arriver à 120 emplois, pour faire tourner la machine sept jours sur sept. « Ce site est extraordinaire, le marché porteur et la main-d’œuvre ultra-compétente, avec une vraie volonté de travail, estime Henri Breban. Nous sommes bien armés pour l’avenir ! »

Comment le CGET intervient en appui aux entreprises…

Céline Brunet, chargée de mission développement au secrétariat général de la Ciala.

Quel est le rôle du CGET dans l’attribution de la prime d’aménagement du territoire ?

Le CGET instruit les dossiers des entreprises qui candidatent à la PAT. Ces dossiers sont ensuite examinés par la Commission interministérielle des aides à la localisation des activités (Ciala), dont le CGET assure le secrétaire général. La commission se réunit chaque trimestre pour étudier les candidatures. Depuis 2014, la Ciala a sélectionné plus de 200 dossiers. Grâce à la PAT, ils ont suscité la création de plus de 14 000 emplois nouveaux.

Pour ce dernier trimestre 2019, nous avons examiné et retenu une quinzaine de dossiers. Ils émanent d’entreprises aux activités variées (sous-traitants automobiles, transformation du lin, recyclage du plastique…) et de tailles différentes, installées partout en France. En amont, nous travaillons avec les agences locales de développement économique, les services territoriaux de l’État et Business France pour détecter et accompagner les projets solides.

Comment accompagnez-vous les entreprises ?

Nous recevons les entreprises qui veulent bénéficier de la PAT pour les aider à constituer leurs dossiers, et nous mandatons des experts qui vont les rencontrer sur site. Cet accompagnement aide beaucoup les entreprises à mûrir et à affiner les projets qu’elles soumettent à la PAT, avant les commissions d’examen. C’est important car, en contrepartie de cette aide publique, elles s’engagent à investir dans du matériel pour développer leur activité, à créer de l’emploi et à le maintenir pendant les trois à cinq ans après la fin de leur programme. Si elles ne tenaient pas leurs engagements, elles seraient contraintes de rembourser l’État.

Une aide de l’État aux projets des entreprises dans les territoires

La prime d’aménagement du territoire pour l’industrie et les services (PAT) est une aide directe de l’État à l’investissement. Elle vise à promouvoir l’implantation et le développement de petites et moyennes entreprises, qui s’engagent à créer de l’emploi et des activités durables, dans les petites communes éligibles aux aides à finalités régionales (lire notre article sur le zonage AFR). La prime peut attribuer jusqu’à 15 000 euros par emploi créé. En 2018, la PAT a permis de soutenir 22 projets ainsi que 2 000 créations d’emplois.

« Une activité qui contrevient à la désindustrialisation du territoire »

Daniel Herbert, maire de Wizernes depuis 1977 et vice-président de l’intercommunalité de la Capso (Communauté d’agglomération du pays de Saint-Omer)

Quels sont les enjeux de la réindustialisation d’une petite ville comme Wizernes ?

La fermeture d’Arjowiggings a été un choc, ici. Quelle tristesse de voir cette usine arrêtée et inerte toutes ces années ! En tant qu’élu local, l’enjeu, c’était d’abord l’emploi. Et puis, c’est vital pour un territoire comme le nôtre de maintenir ce qui existe déjà car la commune, entourée de terres agricoles, a peu de terrains disponibles pour accueillir de nouvelles activités. Par ailleurs, sans le projet audacieux du repreneur, la ville aurait eu une friche industrielle à gérer en zone inondable, sans en avoir les moyens…

Quel rôle la communauté d’agglomération a-t-elle joué pour appuyer le projet de Wizpaper ?

L’intercommunalité, qui a la compétence du développement économique, s’est beaucoup impliquée pour soutenir cette solution de reprise. Les élus du territoire et l’administration publique se sont soudés pour travailler ensemble et y parvenir. Et la Capso a apporté 900 000 euros d’aide à ce projet audacieux.

Pour mon tout dernier mandat, je suis satisfait de voir le succès du redémarrage de la papeterie. Cette activité économique contrevient à la désindustrialisation du territoire et participe de la vitalité de la commune. »

« Le projet de Wizpaper s’inscrit tout à fait dans l’esprit de notre territoire d’industrie, car il crée un écosystème local : une production localisée sur un ancien site industriel, et la récupération des vieux cartons des entreprises du Groupe et de ceux des clients de la grande distribution des alentours. » Jean Bétremieux, directeur de l’action économique et de l’emploi de la Capso

Commune de 3 400 habitants, proche de Saint-Omer, Wizernes est traversée par la rivière l’Aa, propice à l’activité papetière, un secteur traditionnel et plus que séculaire. La petite ville rurale compte deux papeteries sur son territoire, dont l’ancien site d’Arjowiggins, devenu Wizpaper. Vieux de plus de 180 ans, ce site industriel s’étend sur 33 ha.

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Communication du CGET - Novembre 2019
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Credits:

Reportage réalisé avec la contribution de la Direction du développement des capacités des territoires du CGET. © N. Kharbache - M.-P. Ramos - CC Paul Hermans - Géoportail -