Jumelles à la main, Charlotte Francesiaz, de l’Office français de la biodiversité, scrute les oiseaux migrateurs venant sur les côtes françaises. Partons à la découverte d’un métier dédié à la préservation des oiseaux.
Sur le terrain, elle observe, écoute et étudie la migration des oiseaux. Cette chercheuse passionnée travaille également à la récolte et à l'analyse de données sur ces espèces et à la rédaction d'articles scientifiques.
Charlotte Francesiaz est ingénieure experte, spécialiste des oiseaux migrateurs. Elle dirige une équipe de recherche sur les limicoles et oiseaux protégés.
Au quotidien, sur le terrain ou au bureau, elle étudie les flux migratoires des oiseaux, c’est-à-dire les déplacements de populations. Ces déplacements suivent un rythme particulier, on parle de cycle migratoire.
« Les oiseaux migrateurs suivent le même cycle chaque année. Ils passent par quatre grandes phases : l’hivernage, la migration prénuptiale, la reproduction et enfin la migration postnuptiale pour retourner sur les quartiers d’hivernage. »
En plus d’étudier les flux migratoires, Charlotte Francesiaz étudie la dynamique des populations, c’est-à-dire l’évolution des effectifs de populations dans l’espace et dans le temps, et les facteurs qui influencent ces variations.
Il existe plusieurs techniques pour obtenir des données sur le nombre d’oiseaux et leur évolution.
• L’identification et le comptage des oiseaux migrateurs sur des points de passage stratégiques. Cette méthode, bien que non exhaustive, apporte de l’information sur les tendances puisque le protocole est stable dans le temps : les suivis sont réalisés dans les mêmes conditions d’une année à l’autre et sur une longue période.
• Le marquage des espèces par bague, ou matériel de géolocalisation. Bien que coûteuse, la pose d’un GPS permet d’obtenir de nombreuses informations, fiables et en temps réel, sur les déplacements et les migrations des individus marqués.
Au cours de notre visite guidée, nous observons quelques beaux spécimens d’oiseaux migrateurs. Charlotte Francesiaz nous les présente.
Aigrette garzette dite héron blanc au corps élancé et élégant, migratrice partielle qui hiverne en Afrique ou dans le sud de la France. L’espèce a failli disparaître d’Europe, chassée pour ses plumes appelées aigrettes, qui ornaient les chapeaux. Elle bénéficie d’une protection totale sur le territoire français depuis l’arrêté ministériel du 17 avril 1981.
Bécasseaux, avocettes, courlis, vanneaux… On compte des dizaines d’espèces limicoles, la plupart fréquentent des zones humides tels que les étangs, les marais arrière-littoraux ou les salins.
Leurs caractéristiques : ils vivent et se nourrissent sur la vase ou dans les prairies humides, grâce à leurs pattes et leur bec adaptés aux milieux humides et vaseux. L’hiver, ils sont très nombreux sur nos côtes. À la période de reproduction, ils se font plus discrets pour protéger et nourrir leurs petits.
Charlotte Francesiaz participe également à des missions outre-mer et à l’étranger. Le travail en réseau est indispensable à la bonne conduite des études menées sur les oiseaux migrateurs.
Wetlands international, par exemple, est une organisation à but non lucratif qui s'intéresse à la protection des zones humides et à la gestion durable, programme auquel participent les équipes de l’OFB.
Elle insiste également sur l’importance des financements à long terme pour étudier les populations. Même si le cycle des oiseaux semble être le même chaque année, chaque voyage est unique ! Il est donc important de suivre dans le temps les menaces qui pèsent sur ces populations et leur réaction face à elles.
« Baser des décisions de gestion et de conservation sur des faits scientifiques requiert la mise en place de recherche pour accumuler de la connaissance. C’est cette connaissance qui permet de mieux comprendre le monde dans lequel on vit. »
« Aujourd’hui, en plus de comprendre la nature elle-même, il faut être conscient de notre impact sur elle et étudier ces facteurs humains qui menacent la biodiversité. Un monde sans la migration des oiseaux pour rythmer les saisons serait bien triste et il n'est pas sûr que la terre continuerait de tourner très longtemps ! » conclut-elle sur le sens de son métier.
En plus de ses travaux au sein de l’OFB, Charlotte Francesiaz est aussi engagée dans la promotion des femmes scientifiques. Elle a d'ailleurs été récemment sélectionnée par le programme Homeward Bound qui vise à promouvoir les femmes scientifiques engagées pour la défense de notre planète.
Nous l’avions interviewée, à l'occasion de la Journée des droits des femmes.
Credits:
[Photos : Manuel Bouquet - TERRA] - [Textes : Léa Cinquabre]