Conseil citoyen : l'avis des autres

Le 22 février 2017, Benoît Hamon a ouvert sa plate-forme citoyenne pour permettre aux Français de contribuer à l’élaboration de son programme électoral. Le candidat de la Belle Alliance populaire espère rassembler ainsi les électeurs de la gauche.

« J’adhère car j’y crois, mais il ne faut pas que ce soit un coup de com. » Christophe Disic milite dans la section PS de Saint-Ouen : « Si des propositions clairement innovantes apparaissent dans le programme à la suite de la délibération du conseil citoyen, Benoît Hamon aura gagné son pari. Dans le cas contraire, ce conseil n’aura servi à rien. »

Lancée deux mois avant le premier tour de la présidentielle, l’initiative est passée presque inaperçue dans les médias. C’est par les réseaux sociaux que les sympathisants découvrent la plate-forme citoyenne de Benoît Hamon. Plus de 25 000 contributions ont été déposées, et 6 375 personnes ont candidaté pour rejoindre le conseil citoyen.

Elisa Lewis, auteur avec Romain Slitine de Le Coup d’État citoyen, Ces initiatives qui réinventent la démocratie, a mis en place la plate-forme. Elle explique son fonctionnement : « Le conseil citoyen est un processus assez original et inédit pour une élection présidentielle. Le tirage au sort des vingt hommes et vingt femmes qui le composent a eu lieu au début du mois de mars. Tous les citoyens ont pu émettre des contributions pendant deux semaines. Elles seront rassemblées par le conseil citoyen, mandaté pour les ordonner et les enrichir. Entre huit et quinze propositions seront remises à Benoît Hamon les 1er et 2 avril. Il s’est engagé à y répondre de manière argumentée et à en intégrer certaines à son programme. »

Pour Nicolas de Lavergne, consultant en stratégie numérique et proche de Benoît Hamon, « le conseil citoyen est la conscience que la politique ne peut plus être partisane. Il faut une reconnaissance par un mouvement politique des actions citoyennes sur différents secteurs ». Valérie Fritz Mery, secrétaire de la section PS du Bourget, ajoute : « Il faut remotiver les gens. Ils se désintéressent de la politique, ce qui est dramatique, car la politique est présente dans tous les aspects de la vie quotidienne. »

Le projet de Benoît Hamon est-il vraiment inédit ?

Pour Romain Bentegeat, ancien secrétaire de la section PS de Bobigny, « l’investissement d’un frondeur par le parti, c’est un retour de bâton. Les marqueurs de la gauche ont été suffisamment égratignés pendant le quinquennat de François Hollande. Je suis candidat au conseil citoyen car je pense qu’il faut remobiliser les gens. Mais c’est calqué sur les états généraux qui avaient été organisés en 2014 par Jean-Christophe Cambadélis, par lesquels les militants socialistes pouvaient faire des propositions sur une plate-forme en ligne. »

Pour Nassim Meza, secrétaire de la section PS de Rosny-sous-Bois, « Benoît Hamon va au-delà des initiatives citoyennes qui ont déjà pu être mises en place, en s’engageant à répondre aux propositions de son conseil citoyen ». Un avis partagé par Valérie Fritz Mery : « Il remet des passerelles, il recrée une dynamique. C’est très important de garder un pied dans la société civile. »

Cependant, la mise en place d’une telle initiative à moins de deux mois du premier tour interroge. « Ce n’est pas trop tard », assure Elisa Lewis. Romain Bentegeat, lui, estime qu’« il n’y aura pas de véritable impact. Ça arrive bien trop tard car François Hollande était supposé être le candidat du PS ».

À Saint-Ouen, Christophe Disic offre un raisonnement plus pragmatique : « Benoît Hamon ne pouvait pas faire sa plate-forme avant l’investiture de la primaire de la Belle Alliance populaire, faute de moyens. Il bénéficie désormais des sous du PS. Mais on reste dans les temps. Il aura les propositions trois semaines avant le premier tour, au moment où les candidats envoient leur profession de foi aux électeurs. C’est un moyen de récupérer les votes des abstentionnistes de gauche, ceux qui sont écœurés par la politique. »

« C'est une campagne d’interpellation citoyenne »

Pour Elisa Lewis, « l’objectif du mandat du conseil citoyen est très clair : il doit enrichir le programme de Benoît Hamon pour la présidentielle et il ne va pas au-delà. C’est une campagne d’interpellation citoyenne. Le candidat doit y répondre. Et c’est aussi une expérience pour un passage vers d’autres formes d’exercice du pouvoir ».

Nicolas Furet, militant pour Benoît Hamon dans la section de Saint-Ouen, a rendu sa carte au PS il y a deux ans. Il est pourtant candidat au conseil citoyen : « Le PS est devenu un vase clos coupé du monde. L’atout de Benoît Hamon, c’est sa volonté de s’appuyer sur la société civile. Il faut espérer une pérennisation du conseil citoyen, en cas de victoire comme de défaite. Son sort est lié à celui de Benoît Hamon. Il n’est soutenu que par 30 % du PS. C’est le prochain congrès qui déterminera tout ça. »

Nassim Meza et Valérie Fritz Mery s’inquiètent eux aussi de l’avenir de leur parti : « Le PS devrait s’inspirer du conseil citoyen. Il faut que la gauche se reconstruise et que le parti se renouvelle. Un parti politique fermé sur lui-même, c’est un parti qui ne vit plus. »

Comment donner l'envie d'agir ? Écouter l'interview de Valérie Fritz Mery

Une consultation citoyenne autour de 10 thématiques

Texte : Anais Sybellas

Photos : Emmanuelle Corne

Infographie : Agata Frydrych, Claire Dehan-Grubesa

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