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Nouvelles de l'Alliance Jérémie, chap.31

Lecture biblique

31 Des jours viennent – oracle du SEIGNEUR – où je conclurai avec la communauté d’Israël – et la communauté de Juda – une nouvelle alliance.

32 Elle sera différente de l’alliance que j’ai conclue avec leurs pères quand je les ai pris par la main pour les faire sortir du pays d’Égypte. Eux, ils ont rompu mon alliance ; mais moi, je reste le maître chez eux – oracle du SEIGNEUR.

33 Voici donc l’alliance que je conclurai avec la communauté d’Israël après ces jours-là – oracle du SEIGNEUR : je déposerai mes directives au fond d’eux-mêmes, les inscrivant dans leur être ; je deviendrai Dieu pour eux, et eux, ils deviendront un peuple pour moi.

34 Ils ne s’instruiront plus entre compagnons, entre frères, répétant : « Apprenez à connaître le SEIGNEUR », car ils me connaîtront tous, petits et grands – oracle du SEIGNEUR. Je pardonne leur crime ; leur faute, je n’en parle plus. »

Prédication du pasteur Rudi Popp

Dans la Bible, la relation de Dieu avec son peuple est décrite sous le registre de l’alliance. L’alliance évoque un lien juridique entre des personnes qui ne sont pas liées par des liens naturels.

Pour mettre cette idée d’alliance en perspective, nous pouvons l’opposer à deux autres conceptions de la présence de Dieu dans le monde :

Dans la mythologie grecque, l’histoire des humains indiffère les dieux qui sont bien trop occupés à régler leurs propres affaires. Lorsqu’ils s’intéressent aux humains, c’est soit parce qu’ils sont tombés amoureux de l’un d’entre eux, soit pour s’en servir comme des pions dans le jeu compliqué de leurs relations agitées.

Le panthéisme présente la position inverse. Tout ce qui existe est identifié à Dieu. Ce dernier peut se comprendre comme la récapitulation de la totalité de l’existant. À la limite, Dieu se confond avec la nature.

En parlant d’alliance, la pensée biblique récuse ces deux approches en parlant d’un Dieu qui se définit principalement par la libération et l’amour, ce qui induit son implication dans le monde. En cela, un Dieu qui fait alliance exige une prise de responsabilité de la part de l’humain.

Car lorsque Dieu a créé l’univers, il a doté la création d’une autonomie. Il a donné les lois de la nature pour que le monde puisse vivre et perdurer, et il a doté les humains d’une intelligence et d’une conscience pour qu’ils sachent comment se comporter. L’humain peut très bien vivre sans Dieu, car ce dernier n’a pas voulu s’inscrire dans l’ordre de la nécessité, mais de la liberté. Une fois la liberté posée, Dieu propose à l’humain une relation de collaboration exprimée par l’alliance.

Dans le vocabulaire de la Bible hébraïque, le verbe associé à l’alliance n’est pas « lier » comme en français, mais « trancher » : on tranche une alliance, ce qui signifie que cette notion ne repose pas sur la fusion, mais sur la reconnaissance et la dignité des différences. En s’alliant à l’humain, Dieu reconnaît notre autonomie.

En s’alliant à l’humain, Dieu reconnaît notre autonomie.

Nous trouvons dans la Bible hébraïque trois grandes alliances : avec Noé, Abraham et Moïse. Les interprétations rabbiniques montrent que, lors de ces différentes alliances, les humains acquièrent un niveau de responsabilité de plus en plus élevé.

La première alliance, avec Noé, décrite en Gen 9, est certes universelle (elle inclut les animaux !), mais elle est unilatérale. « Je vais établir mon alliance avec vous, dit Dieu, avec votre descendance après vous et avec tous les êtres vivants qui sont avec vous : oiseaux, bestiaux, toutes les bêtes sauvages qui sont avec vous, bref tout ce qui est sorti de l’arche avec vous, même les bêtes sauvages… » Le signe de l’alliance avec Noé est l’arc-en-ciel - c’est pour dire que l’humanité n’y prend aucune part : Dieu promet de sauvegarder la création sans que l’humain n’ait rien à faire de particulier.

Dans l’alliance avec Abraham, décrite en Gen 15-17, celui-ci doit, par la circoncision, marquer dans sa chair son appartenance au peuple de Dieu. « Voici mon alliance que vous garderez entre moi et vous, c’est-à-dire ta descendance après toi : tous vos mâles seront circoncis : vous aurez la chair de votre prépuce circoncise, ce qui deviendra le signe de l’alliance entre moi et vous. »

Et dans l’alliance avec un grand A, celle du Sinaï, selon l’Exode et le Deutéronome, le peuple d’Israël devient un véritable partenaire qui doit vivre la Torah, et qui concerne toutes les dimensions de la vie. « Maintenant, dit Dieu, si vous entendez ma voix et gardez mon alliance, vous serez… pour moi un royaume de prêtres et une nation sainte » - Et « tout le peuple répondit, unanime : “Tout ce que le SEIGNEUR a dit, nous le mettrons en pratique. » Le signe de l’Alliance de Moïse sont les Tables de la loi, qui contiennent le décalogue - les Dix paroles ou commandements.

Après l’Alliance du Sinaï, Dieu est encore intervenu par l’intermédiaire des prophètes afin de préciser le sens de la Torah, jusqu’au moment où il a considéré qu’il avait formulé tout ce qu’il avait à dire et que l’humanité était devenue adulte.

Pour éclairer l’évolution entre les différentes alliances, les maîtres du judaïsme ont utilisé l’image d’un père avec son enfant. Lorsque l’enfant a deux ans, le père ne lui lâche pas la main lorsqu’ils sont dans la rue ; lorsqu’il a huit ans, l’enfant peut marcher seul ; à dix ans, il traverse la chaussée ; à quinze, il voyage seul et lorsqu’il est adulte, il est autonome.

Or, une part importante de cette autonomie est la possibilité de révolte ! CG Jung écrit à juste titre : « Dieu n’a pas élu pour ses fils ceux qui restent accrochés à lui parce qu’il est le Père, mais ceux qui ont trouvé le courage de tenir debout tout seuls. » Tenir debout, avec nos révoltes, fait partie du risque de l’Alliance. En prenant ce risque, Dieu poursuit le mouvement amorcé lors de la création qui le voit se retirer pour laisser de plus en plus d’autonomie à l’humain.

Les disciples de Jésus ont alors reconnu, dans la croix et la résurrection du Christ, la « nouvelle alliance » annoncée par le prophète Jérémie. L’argument, si je peux dire, développé dans ce texte, a été immédiatement le leur : la nouvelle alliance en Christ sera différente de l’alliance conclue avec leurs pères, quand, dit Dieu, « je les ai pris par la main pour les faire sortir du pays d’Égypte » - mais eux, ils ont rompu l’alliance. Pour les Chrétiens, la nouvelle alliance devait tenir compte de ce qu’ils ont considéré comme l’échec de l’ancienne.

Or, malgré l’indiscipline et l’obstruction dont son peuple fait preuve, Dieu « reste le maître chez eux ». Seulement, la nouvelle alliance - qui est bien destiné à Israël et Juda - ne procédera plus par la méthode d’une loi écrite à respecter et à faire respecter, à interpréter et à décrypter. C’est comme si Dieu procédait à une réforme pédagogique : le contenu et le partenaire de l’alliance ne changent pas, mais la mise en pratique sera différente : « Je déposerai, dit Dieu, mes directives au fond d’eux-mêmes, les inscrivant dans leur être ; je deviendrai Dieu pour eux, et eux, ils deviendront un peuple pour moi. Ils ne s’instruiront plus entre compagnons, entre frères, répétant : Apprenez à connaître le SEIGNEUR, car ils me connaîtront tous, petits et grands. »

La nouvelle alliance, selon Jérémie, est au fond une réforme pédagogique. C’est la suppression des catéchismes et des cours de morale dont Dieu se lasse autant que l’humain. C’est donc une nouvelle alliance qui confirme d’abord la volonté de libération et d’amour de Dieu, et son implication dans le monde ; elle confirme l’alliance qui exige une prise de responsabilité de la part de l’humain.

Ensuite, la nouvelle alliance ne supprime pas l’ancienne, celle du Sinaï. Elle vise à la renforcer par l’adhésion quasi involontaire du partenaire : l’alliance est « inscrite dans leur être ». Même si ça sent un peu l’alliance génétiquement modifiée, nous comprenons qu’il est question d’une relation intériorisée à Dieu : l’humain ne sera pas relié à Dieu par une loi qui lui reste extérieure, qu’il est en permanence tenté de transgresser ; mais la relation à Dieu relève d’une intuition, elle constitue l’humain comme humain.

Cet aspect, les disciples de Jésus l’ont reconnu dans la figure du Christ : en lui, la relation à Dieu n’est plus une question de morale, de respect de consignes et de prescriptions. L’alliance avec Dieu libère, elle n’opprime personne.

Or, la lecture chrétienne de la nouvelle alliance posait au moins deux problèmes : d’abord, celui de du rejet d’Israël que Dieu, selon certaines idées, aurait rejeté pour épouser sa nouvelle fiancée, l’Église ; puis, celui du rapport à la Torah, qui reste donc opérationnelle en tant que contenu de la relation à Dieu, même si la forme change. Ces deux malentendus ont produit deux malheurs de l’histoire qui se poursuivent jusqu’à nos jours : le premier malentendu est toujours présent sous certains aspects d’un antijudaïsme chrétien, donnant parfois raison à l’antisémitisme raciste ; le second malentendu s’est traduit par le moralisme sombre des Églises chrétiennes qui a, pour le dire rapidement, produit l’idéologie libertine moderne.

Je ne crois donc pas que la nouvelle alliance soit déjà parfaitement réalisée par ce que nous appelons le christianisme ! Il reste encore le chemin de la Torah à faire, même si nous reconnaissons aujourd’hui, en tant que Chrétiens protestants et catholiques, la primauté d’Israël dans l’Alliance, et même si la confusion entre Évangile et morale se lève doucement par l’effacement des mœurs chrétiennes.

Toujours, nous espérons avec le peuple juif que Dieu fera du nouveau, en déposant ses directives au fond de nos cœurs, pour les inscrire dans notre être ; pour devenir, à nouveau, Dieu pour nous, et nous, nous deviendrons un peuple pour lui. Amen.

Created By
Rüdiger Popp
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Credits:

Inclut des images créées par rawpixel - "people hands achievement" • Siora Photography - "untitled image" • Bulkan Evcimen - "untitled image" • Nick Moore - "untitled image" • ddimitrova - "girl father portrait" • Tyler Nix - "untitled image"

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