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OM-ASSE : quarante ans de rendez-vous irrationnels au Vélodrome Avant OM-asse CE DIMANCHE à 21 HEURES

L’histoire des rencontres entre l’AS Saint-Étienne et l’Olympique de Marseille est riche, très riche. Des matches fous, des faits de jeu marquants, des péripéties, des passages de joueurs d’un club à l'autre, des coups bas, sur et en dehors du terrain. L’histoire, celle qui se répète chaque année, c’est aussi cette statistique incroyable : la dernière victoire stéphanoise dans les Bouches-du-Rhône remonte au 10 août 1979. Quarante ans ! Depuis ? Vingt et une défaites des Verts et quatre nuls en vingt-cinq matches de première division, et une autre partie perdue en coupe de la Ligue en janvier 96 (2-0, l’OM était en D2).

« Presque un traumatisme »

Comme expliquer cette série catastrophique ? « Je ne sais pas. Tous les clubs ont du mal face à une équipe en particulier. C’est peut-être une question d’état d’esprit », émet Jean-Pierre Cyprien, qui garde un excellent souvenir des confrontations avec les Papin, Boksic, Völler. « Ils étaient de grands joueurs et toujours motivés. Au début des années 90, l’OM était le Paris de maintenant, il n’y avait que des internationaux et à chaque fois, on savait que ça allait être dur », avance l’ancien défenseur central des Verts (1990-1994), qui a joué 11 matches à l’OM (1999-2000), sans pouvoir apporter d’explication concrète sur la suite de la série après l’ère Tapie et jusqu’à nos jours.

« Au Vélodrome, c’était mission impossible. » Lubomir Moravcik, ex milieu de l'ASSE (1990-1996)
1er septembre 1993 au Vélodrome : Jean-Pierre Cyprien, capitaine des Verts qui couvre son gardien, Joseph-Antoine Bell sous le regard de Boksic, Primard, Völler et Blanc. L'ASSE s'incline 3-1.

« Il y a des équipes qu’on n’arrive pas à battre, c’est comme ça », lâche presque fataliste Christian Lopez, qui faisait partie de la dernière équipe victorieuse chez les Phocéens. « Chaque année, cela reste dans les esprits. Quand on prépare le match, on se remémore les années d’avant », poursuit l’ancien défenseur stéphanois (1971-1982). La pression du Vélodrome inhibe-t-elle les volontés, conjuguée tantôt au talent de l’adversaire ou au défi physique qu’il impose ? Les Stéphanois n’arrivent-ils pas à maitriser leurs émotions ? Peut-être un peu de tout à chaque fois… Il suffit de plonger dans les archives ou les mémoires pour se rendre compte que l’ASSE a souvent manqué de caractère, se faisant marcher dessus pendant quarante ans de déplacements. Le coup est passé tout près à une poignée de reprises, encore très récemment en 2016 (lire plus bas) : « Même quand on arrive à avoir la maitrise du match, il peut se passer plein de choses », met en garde Lopez, qui ne parle « pas de traumatisme, mais presque ».

Élie Baup : « Il faut plus de sang-froid et de maitrise »

« Pour le club qui reçoit, et inversement quand c’est à Saint-Étienne, c’est une affiche. Tout le monde est prévenu match et tend à faire un résultat », rappelle Élie Baup, ancien entraineur des deux équipes. « Pourquoi Saint-Étienne ne gagne pas, je ne sais pas. C’est pareil, pourquoi Marseille n’a pas gagné à Bordeaux depuis je ne sais combien d’années (NDLR : la dernière victoire de l’OM à Bordeaux remonte à 1978) ? » L’actuel consultant Ligue 1 chaque week-end sur les antennes de beIN SPORTS assure en tout cas : « Il faut plus de sang-froid, de maitrise. C’est plus fort que d’habitude. » Élie Baup a connu trois OM-ASSE sur le banc de touche stéphanois. Le premier, en janvier 1996, en coupe de la Ligue, perdu 2-1. « Marseille était en D2, on s'était fait marcher dessus, c'était incroyable », se rappelle un suiveur de l'ASSE depuis plusieurs dizaines d'années.

Des souvenirs tabous dans les années 2000

Certains événements restent dans les mémoires et sont encore tabous à l’ASSE, qui n’a pas souhaité que certains acteurs du passé, aujourd’hui membres du staff de l’équipe professionnelle, évoquent les douloureux souvenirs. Dans les années 2000, plusieurs coups du sort ont modifié l’histoire en défaveur de Saint-Étienne...

  • En 2001, Laurent Huard égalise à la 87e, six minutes avec l’ouverture du score de George Weah. Dans la foule, Adriano fait chavirer le Vélodrome (2-1).
  • Trois ans plus tard, dimanche 17 octobre 2004, fraichement remontée de D2, l’ASSE mène 1-0 grâce à Feindouno et tout proche du Graal. Mais l’arbitre accorde sept minutes d’arrêts de jeu au grand dam d’Elie Baup ou encore de Julien Sablé, capitaine. Koke arrache le nul à la 96e minute. L'entraîneur entre dans une colère noire et est expulsé. Ses joueurs quittent le terrain dégoûtés...
Lors de la saison 2004-2005, Les Verts menaient 1-0 grâce à un but de Pascal Feindouno. l’arbitre accorde sept minutes d’arrêts de jeu et Koke arrache le nul à la 96e minute. Jérémie Janot, réconforté par Jeannot Dées, et le capitaine Julien Sablé quittent le terrain, dépités. Photos Le Progrès/Celik ERKUL

Baup : « Tant qu’ils n'égalisaient pas... »

Élie Baup, ancien entraîneur de l’ASSE (1994-1996, 2004-2006), de l’OM (2012-2103) et actuel consultant Ligue 1 chaque week-end sur les antennes de beIN SPORTS revient sur cette décision arbitrale qui a permis à l’OM d’égaliser au bout de la nuit : « On menait 1-0 au Vélodrome, on tenait un très bon résultat. Marseille poussait énormément sur notre but. On a toujours une réaction négative. On ne vit pas le truc bien, on sent qu’on va être sous la pression et que Marseille risque d’égaliser. Le temps additionnel était anormal, vraiment très long. J’avais calculé, ce n’était pas le même que l’arbitre. J’avais déclaré après : tant qu’ils n’auraient pas égalisé, on aurait continué. On était sous la pression, on s’accrochait à ce but d’avance, c’était dur de voir autant de minutes de temps additionnel. Je savais que l’arbitre allait m’expulser, j’ai fait signe qu’il s’était trompé, l’arbitre est venu, il m’a dit de partir. Tout le groupe l’avait mal vécu, le club aussi. C’est un des moments qu’on ressent comme une justice. Il faut temporiser mais ce n’était pas facile pour nous. Même un match nul restait une grosse performance. Marseille, c’est un endroit compliqué avec la pression du Vélodrome, la qualité de l’adversaire… A la 93e quand vous menez 1-0 vous y croyez fort. »

D.N.

  • Le cauchemar de Fousseni Diawara en 2006

La saison suivante, dimanche 12 mars 2016, Fousseni Diawara oublie son maillot au vestiaire et met six minutes à entrer en jeu après la blessure de Loïc Perrin. Le kiné file aux vestiaires, lequel est fermé à clé. C’est finalement Fred Émile, l’intendant, qui sprintera chercher la tunique. A dix, les Verts encaissent pendant ce temps un doublé de Pagis et s’inclinent 2-0… Jérémie Janot (notre photo du match ci-contre de Philippe VACHER) ne peut rien faire. L’ancien défenseur, fautif ce soir-là, n’a pu etre joint. Il y a trois ans, dix ans après la boulette, France Football consacrait un article, citant le Malien. Extraits : « C’est un cauchemar, tout le monde se moque de moi ! J’ai pénalisé toute l’équipe, confie Diawara le lendemain à L’Est Républicain. Je m’en veux terriblement. Je n’ai pas fermé l’œil, dans la nuit de dimanche à lundi. Je ne sais pas comment tout ça a pu arriver. Sur le banc, je pensais vraiment être vêtu de mon maillot de match. Mais en réalité, sous mon blouson, je n’avais que le sweat du club et un tee-shirt. Dans la plupart des stades de France, on passe rapidement de la pelouse aux vestiaires. Au Vélodrome, en revanche, il y a une distance assez importante à parcourir. A Geoffroy-Guichard, j’aurais eu besoin de trente secondes à peine pour aller chercher mon équipement. »

Christian Lopez confirme : « Les vestiaires étaient loin à Marseille ! On descendait vers le poteau de corner, descendre escaliers fallait les remonter y avait un couloir avec les vestiaires… » Pour l'ex défenseur de la grande époque, cette scène illustre directement ses propos concernant les rebondissements inattendus : « Ça reflète ce que je dis. Même quand on arrive à avoir la maitrise sur un match, il peut se passer plein de choses. C’est ce qu’il s’est passé. »

D.N.

Élie Baup et le maillot oublié : « Un moment de panique générale incroyable »

Comment avez-vous réagi quand vous avez appris que Fousseni Diawara n’avait pas son maillot sur lui ?

La blessure de Loïc (NDLR : passé à la cisailleuse Renato Civelli au quart d’heure de jeu) est compliquée à gérer, vu le choc on sait que c’est douloureux. Il faut réagir vite. Fousseni Diawara est sur le banc. Il faut vite le faire rentrer, il n’y a pas de temps d’échauffement. On se dit déjà que c’est trop long pendant que le remplaçant se prépare pour entrer. On a envie de suite de se retrouver à 11 contre 11. On demande à un autre joueur de prendre la place de Loïc mais on sait qu’il faut très vite un défenseur. Je ne comprends pas, je regarde le match et on me dit qu’il n’a pas le maillot. Je deviens fou. »

Que se passe-t-il ?

« On y va, mais la clé du vestiaire est restée sur le banc. On demande ce qu’il se passe, il faut repartir. C’est un moment de panique générale incroyable où tout le monde prend conscience de la situation. Malheureusement on n’est pas prêt à y répondre car il n’a pas son maillot. Évidemment, les actions de Marseille se passent sur le côté où il n’y a pas le spécialiste et on prend deux buts. C’est un truc incroyable, on a tous eu une attitude d’énervement. L’absence de maitrise émotionnelle s’est transmise à l’équipe. A 10, il faut être lucide et gérer ces moments-là. L’équipe a senti qu’il se passait un truc, nous aussi. L’émotion a pris le dessus sur la situation. »

Que vous dites-vous après les deux buts ?

« On se dit que c’est un moment mal géré qui sert de leçon. Pour les matches suivants, j’ai demandé aux adjoints que quelqu’un contrôle bien que les gars sur le banc soient à tout moment prêt à entrer. On râle souvent que le gars n’a pas les protège-tibias remontés, pas les chaussures lacées… Là c’était encore plus grave. C’est l’anecdote qui ridiculise tout le monde. C‘est un fait très rare, un truc incroyable, tout le monde pense que les joueurs sont prêts sur le banc à rentrer. C’est dans des situations comme ça qu’on grandit, que l’on en retire des expériences, mais si c’est cruel. On a trop cédé à la panique. Après, tout le monde, les médias, ont orienté sur l’absence du maillot, c’était une évidence, un raccourci facile. »

Comment avez-vous parlé à Fousseni Diawara ?

« Le joueur culpabilise à mort et sait qu’il a une part de responsabilité. A chaud, je savais qu’il fallait faire face aux médias. Tout le monde, l’équipe et le joueur étaient touchés, ce n’était pas la peine d’en rajouter. On a envie de gueuler, de tout extérioriser mais ce n’est pas le bon moment. Déjà, sur le moment, l’émotionnel a pris le dessus. On a crié dessus mais ce n’est pas la bonne attitude. Ensuite, il faut se demander pourquoi c’est arrivé, tout en faisant attention à ne pas perdre le joueur à cause de ça car la saison continue. C’est la complexité de la situation, c’est trop facile de dire au joueur que c’est de sa faute et que c’est fini. »

Recueilli par Damien NORE

« L’impression d’être secoué comme un prunier »

Allen Boksic devance Sylvain Kastendeuch sur cette action et ouvre la marque pour l'OM. Ce sera l'unique but de la rencontre le 24 octobre 1992. Photo Le Progrès/Lionel LOPES-QUINTAS

« On ne concède qu’un seul but. Pourtant à l’issue de la partie on avait eu l’impression d’en prendre une pleine valise. Nous nous étions fait secouer comme des pruniers. Comme à chaque fois que l’on se rendait au stade Vélodrome ». Sylvain Kastendeuch est lucide. Sans vouloir jouer les victimes expiatoires, les protégés du président André Laurent, savent que le déplacement dans les Bouches-du-Rhône n’a rien d’une promenade de santé. Ils constatent qu’il y a un mistral perdant. « Dès que tu descendais du bus, tu sentais le poids de cette rencontre, toutes les personnes étaient tournées vers un objectif unique, que l’OM gagne et que le match soit plié le plus rapidement possible ». Ce soir-là, il ne croit pas si bien dire.

« Ils lisaient notre jeu »

À peine le premier quart d’heure terminé que le Croate Alen Boksic passe devant le capitaine stéphanois et glisse la balle au fond des filets. Le vélodrome explose.

Il s’attend à voir un feu d’artifice. Les joueurs de Jacques Santini s’arc-boutent et regagnent les vestiaires sur le score de 1-0. Un moindre mal. L’OM s’impose sur la plus étroite des marges mais « honnêtement on n’avait jamais pu desserrer l’étau. C’est un petit exploit de ne pas en ramener une pleine valise ». Il poursuit en plaisantant : « On aurait dit qu’ils faisaient de la magie noire, qu’ils lisaient dans nos pensées. Ils contrariaient tous nos plans. Ils étaient protégés par la Bonne Mère ». Et à chaque fois c’est le même scénario, une pression d’enfer qui fait plier la ligne de défense des Verts.

L.L.Q.

OM : 1 - ASSE : 0

(24 octobre 1992).- 25 000 spectateurs.

But : Boksic (20e)

> Marseille : Barthez, Desailly, Casoni, Angloma, Eydelie, Sauzée, Deschamps, Thomas, Boksic (puis Di Meco, 61e), Völler, Pelé. Entraîneur : Jean Fernandez.

> ASSE : Bell, Deguerville, Cyprien, Kastendeuch, Gros, Primard (puis Molnar, 63e), Despeyroux (puis Chaintreuil 31e), Cuervo, Passi, Moravcik, Mendy. Entraîneur : Jacques Santini.

En haut à gauche : Alen Boksic ici devant Jean-Pierre Cyprien fut un poison permanent pour Saint-Etienne. En haut à droite : Raymond Goethals, le sorcier Belge, aussi prénom Raymond la Science savait amadouer le caractère fantasque de son président. Il livre une de ses recettes à Christian Sarramagna. En bas à gauche : Bernard Tapie a la mine des mauvais jours. Pourtant contre Saint-Etienne, le succès lui a souvent sourit. En bas à droite : La présence de l'attaquant allemand Rudi Völler dans la surface de réparation stéphanoise imposait une vigilance de tous les instants. Jean-Philippe Primard se trouve sur le qui-vive face au rusé Völler. Photos Le Progrès/Lionel LOPES-QUINTAS

OM - ASSE : les Verts victimes des misères de Rudi Völler le 1er septembre 1993

Bayal Sall : « J'avais vraiment eu les boules ce jour-là »

Déjà auteur d’un cadeau le 9 mars 2008 (2-0), Moustapha Bayal Sall récidive huit ans plus tard dans ce qui reste le dernier match où les Verts auraient dû l’emporter. Dans les arrêts de jeu, le défenseur relance mal et rend la balle à l’OM. Derrière Théophile-Catherine fait faute et Batshuayi égalise (1-1)... Le colosse, aujourdhui à Lyon-Duchère (National), se souvient de cette rencontre : « On a toujours eu du mal là-bas, c’est vrai. Le souvenir qui m'est resté, c'est lorsqu'on y est allé pour ma dernière saison à Sainté, en 2016. On n’a jamais gagné au Vélodrome de toute ma carrière à l’ASSE et on mène 1-0 dans les dernières minutes (NDLR grâce à Monnet-Paquet, buteur à la 85e, photo ci-contre). On est plus fort qu'eux sur le match... Mais à la toute dernière minute, sur un coup franc indirect d’Alessandrini, Batshuayi marque. Alors qu'on avait vraiment été meilleurs que l'OM. J'avais vraiment eu les boules ce jour-là car on aurait dû ramener la victoire. »

D.N. avec A.C.

La dernière victoire des Verts : 3-5 le 10 août 1979

Le 10 août 1979, Michel Platini et Johnny Rep jouent le premier match avec l'ASSE à l'extérieur. Défenseur des Verts de 1971 à 1982, Christian Lopez se souvient de la rencontre : « On avait gagné 5 à 3, c’est ça ? Si mes souvenirs sont bons on était menés au score, on a égalisé et on est passés devant ».

Dans les années 70, les confrontations entre les deux clubs étaient déjà chaudes entre les deux clubs, entre autres à cause de certains joueurs partis à l'OM (tels Carnus, Bosquier ou encore Bereta, pour qui ce fut un crève-cœur). L'entraîneur en 1979, Robert Herbin, se rappelle de l’arrivée en bus : « On avait été canardés de pierres et projectiles, c’était chaud ! »

Christian Lopez (1971-1982) confirme: « Il y a toujours eu des heurts. Chaque fois qu’on allait jouer à Marseille c’était chaud au début et à la fin avec les supporters. Les pierres, c’est un peu normal à Marseille, chaque année, l’arrivée était mouvementée. Il fallait aussi répondre présent sur le terrain. Il n'y avait pas que des tendres des deux côtés. Quand ils venaient chez nous, on les battait. »

L'Olympique de Marseille n'a pas gagné à Geoffroy-Guichard entre 1951 et 1980. Lors de la saison 1950-1951, les Marseillais s'imposent 2-1. Après 1980, il faudra attendre 1986-1987 pour voir les deux équipe s'affronter. A Saint-Étienne, l'OM l'emporte le 28 mars 1987.

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