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Audacieuses, ces femmes qui font l’Histoire EXPOSITION VIRTUELLE

MARIE-LOUISE DISSARD, alias « Françoise » (1881-1957)

L’une des rares femmes dirigeantes d’une organisation de la Résistance

Née en 1881 à Cahors, rue de la liberté, Marie-Louise Dissard a vécu sa jeunesse dans la campagne lotoise. D’un tempérament indépendant et volontaire, elle quitte la maison familiale dès sa majorité, fuyant le destin dévot que lui réservent ses parents. Durant son adolescence, elle a développé des talents certains pour la peinture, le dessin, la sculpture et la couture. Femme de caractère et de courage, elle entrera dans l’Histoire comme une figure féminine emblématique de la Résistance. Seule, elle a dirigé le réseau d’évasion britannique « Françoise », un maillon essentiel de la Résistance. N’hésitant pas à user de tous les stratagèmes pour brouiller les pistes de la Gestapo, passée maîtresse en l’art du déguisement, elle a été d’une redoutable efficacité. Elle tombera pourtant dans l’oubli et mourra dans une grande solitude en 1957. Il faudra alors des décennies avant que sa mémoire ne soit réhabilitée.

1902 : Maîtresse d'internat au lycée de jeunes filles de Toulouse, elle insuffle un vent de liberté aux lycéennes. Par la suite elle devient inspectrice de couture en écoles municipales, puis prend son indépendance.

1929 : Propriétaire d’une petite boutique de couture, « À la poupée moderne », au 40 rue de la Pomme à Toulouse qui ne désemplit pas. Sa créativité, ses talents et son imagination lui permettent d’honorer de nombreuses commandes pour le Théâtre du Capitole.

1940 : Profondément révoltée par la défaite, l'exode, la répression et les premières lois antisémites, Marie-Louise devient agent de liaison sous le pseudonyme « Victoire ». Hypersensible, exubérante et enjouée, elle évoque sans filtre ses opinions. La police française ouvre alors une enquête pour conclure au déséquilibre mental ! Marie-Louise Dissard joue de cette réputation pour agir plus tranquillement.

1942 : Elle rencontre Albert Guérisse, officier belge, chef du réseau d’évasion britannique Pat O’Leary qui récupère les aviateurs britanniques et américains tombés sur le sol français pour les renvoyer au combat. Marie-Louise Dissard devient « Françoise » et trouve les passeurs, les contacts et les lieux pour l’hébergement, le ravitaillement et le transfert des « colis ».

1943 : A l’arrestation de son chef Dr Albert Guérisse, Marie-Louise est officiellement nommée à la tête du « Réseau Françoise ». Elle restera en résistance jusqu’à la Libération.

1956 : Elle s’engage en faveur de l'apprentissage des jeunes filles en initiant l'idée de créer un centre d'apprentissage féminin, inauguré route d’Espagne à Toulouse.

1957 : Malgré son statut dans la Résistance, son sens profond des valeurs humaines et ses actes de bravoure, elle reçoit la Légion d’honneur, est décorée de la croix de guerre mais n’obtient pas le titre de compagnonne de la libération.

« Détournez-vous des basses matérialités, en vous exaltez le beau, le grand, le vrai. Chérissez ces biens les plus précieux, la liberté, le terroir, la patrie, et l’Humanité même… »

MARGUERITE CANAL (1890-1978)

Première femme cheffe d’orchestre en France

Née en 1890, Marguerite Canal s’imposera comme une grande figure haut-garonnaise dans le domaine des arts et de la musique en consacrant sa vie à la pédagogie, la scène et la composition. Les deux périodes de guerre vont influencer son destin musical et ses épreuves de vie de femme, déterminer son œuvre dans le style dramatique et lyrique, lui conférant un caractère universel et intemporel. Bercée dès son plus jeune âge dans un univers familial littéraire et musical stimulant, tout semblait pourtant la prédisposer à une carrière de chanteuse lyrique. Mais à 27 ans, Marguerite Canal bouscule l’univers du classique en devenant la première femme cheffe d’orchestre en France.

1902 : Marguerite Canal et sa famille quittent leur appartement du 3 rue des Lois à Toulouse pour la capitale où Marguerite devient très vite une brillante étudiante du conservatoire de Paris.

1914 : Elle débute sa carrière de compositrice, dans un style dramatique et lyrique, en s’inspirant des textes des plus grands poètes contemporains.

1917 : Marguerite Canal devient la première femme cheffe d’orchestre en France. Elle dirige l’orchestre de l'Union des femmes professeures et compositrices de musique au Trocadéro puis au Palais des Glace à Paris lors d’un concert au profit des blessés de guerre.

1920 : Elle reçoit à l’unanimité le Grand prix de Rome en composition musicale. Elle passe ensuite une dizaine d’années à la Villa Médicis à Rome où elle va composer la majorité de ses œuvres sous l’inspiration de grands poètes contemporains. Particulièrement mélancolique, elle exprime ses affinités avec le poète des « Fleurs du mal » à travers « Les Sept Poèmes » de Baudelaire.

1939 : Marguerite est nommée chevalière dans l’ordre de la légion d’honneur. Après la Seconde guerre, elle ralentit fortement le champ de la composition, préférant se consacrer à l’enseignement et aux concerts.

« Marguerite Canal est une compositrice inspirée qui garde à la mélodie française le style de Fauré, Debussy et Duparc, style qui est sobre, noble et pur. » Mario Facchinetti musicologue à propos de Marguerite Canal, 1956

JANE DIEULAFOY (1851-1916)

Archéologue, autrice de romans, de nouvelles, de théâtre, journaliste et photographe amatrice

Née en 1851 dans une famille aisée de Toulouse et formée au couvent de l’Assomption d'Auteuil à Paris, rien ne prédispose Jane Dieulafoy au destin intrépide qui sera le sien : une vie riche de découvertes archéologiques et d’aventures humaines … Sa condition de femme ne devant pas faire obstacle à ses quêtes, Jane Dieulafoy n’hésitera pas demander une permission de travestissement pour pouvoir s’introduire les cheveux courts, en vêtements d’homme, dans des milieux interdits aux femmes et se déplacer plus aisément. Jane Dieulafoy, aventurière et pionnière, ayant su faire preuve d’audace et de courage pour mener à bien ses expéditions, s’éteindra au domaine familial de Langlade à Pompertuzat en 1916.

1870 : Jane Dieulafoy se marie à l’archéologue Marcel Dieulafoy avec qui elle fera équipe pendant près de 14 ans.

1881 - 1882 : à la demande du ministère de l'Instruction publique et des Beaux-arts, le couple part en Perse et sillonne plus de 6000 km à la recherche des origines de l'architecture occidentale.

1883 : le couple fouille la cité Suse et découvre la frise des Lions du palais de Darius, la rampe de l’escalier du palais d’Artaxerxès III et la frise des Archers qu’il rapporte en France. Les trésors sont exposés au Louvre dans les deux « salles Dieulafoy » inaugurées la même année. Jane est honorée de la croix de la Légion d’honneur au titre de sa contribution.

1883 - 1886 : Publication sous forme de feuilleton des récits de voyages de Jane Dieulafoy dans la revue Le Tour du monde. Ces récits sont issus de son journal de bord dans lequel elle rend compte de leurs découvertes archéologiques en Perse ainsi que d’annotations inédites sur le milieu et la société persane où elle mêle descriptions, anecdotes, rappels historiques et illustrations photographiques.

1904 : Elle contribue à la création du prix de la revue La Vie heureuse, dont elle est la première présidente, qui deviendra le prix Femina. À l’approche de la première guerre mondiale, elle milite pour l'intégration des femmes dans l'armée.

« Nous avons acquis au prix d’un travail opiniâtre et d’efforts dont nul ne soupçonnera jamais l’âpreté, des richesses archéologiques inestimables. (…) En ma qualité d’historiographe des fouilles, il m’appartient de parler haut et fort et sans fausse modestie. La mission de Susiane a livré une bataille désespérée et la Providence aidant, elle revient victorieuse.» Extrait à Suse, journal des fouilles. 1884-1886

FRANCOISE D’EAUBONNE (1920-2005)

Créatrice du mouvement Ecologie-Féminisme

Née à Toulouse en 1920, Françoise d’Eaubonne, femme courageuse, véhémente est une écrivaine engagée, journaliste et enseignante au style cru et sans détours. Résistante dans le sud-ouest de la France pendant la Seconde Guerre mondiale, elle milite sa vie entière contre toute forme d’oppression. Françoise d’Eaubonne est l’initiatrice du mouvement Ecologie-Féminisme, pointant des causes communes entre l’oppression patriarcale des femmes et l’exploitation capitaliste des ressources de la planète qui, selon elle, répondent aux mêmes mécanismes de domination.

1944 : Après un brillant parcours à la Faculté de Lettres et aux Beaux-Arts de Toulouse, Françoise d’Eaubonne débute sa carrière d’écrivaine avec la sortie de l’ouvrage Le Cœur de Watteau, premier d’une longue série de biographies.

1947 : Françoise d’Eaubonne obtient le premier prix des lecteurs et lectrices pour son roman Comme un vol de Gerfauts (Esprit).

1966 : Publication du roman Chienne de jeunesse aux éditions Julliard dans lequel elle trace et retranscrit toute la violence de sa vie d'adolescente sous l'Occupation : des privations quotidiennes à sa rencontre avec des rescapé·e·s juif·ve·s à la Libération.

1971 : Signataire du « Manifeste des 343 » pour le droit à l’avortement, Françoise d’Eaubonne s’impose peu à peu comme pionnière du mouvement féministe en France; elle cofondera le Mouvement de Libération des Femmes (MLF).

1972 : Soulignant l’aspect bisexuel originel des individus, elle lance le Front homosexuel d'action révolutionnaire (FHAR).

1974 : dans son essai « le féminisme ou la mort », elle donne naissance au terme « éco-féminisme », issu de la contraction des mots « écologie » et « féminisme », qu’elle avait introduit dès 1972.

Dès 1978 : son œuvre et son engagement révèlent ce mouvement novateur au-delà de nos frontières : aux Etats Unis et en Australie où le concept d’Ecologie-Féminisme rencontre alors un franc succès.

« [La société patriarcale] s’étant emparée du sol, donc de la fertilité, et du ventre des femmes, il était logique que la surexploitation de l’une et de l’autre aboutisse à ce double péril menaçant et parallèle : la surpopulation -excès des naissances- et la destruction de l’environnement -excès de produits- ». Extrait de « Le Féminisme ou la mort »

MARGUERITE DILHAN (1876-1956)

Pionnière des tribunaux

Née en 1876, Marguerite Dilhan est la première avocate française à avoir plaidé en cour d'assises. Cette brillante avocate se démarque de ses homologues masculins par ses plaidoiries brèves et efficaces. Par l’exemplarité de son parcours professionnel inédit, Marguerite Dilhan s’impose en défenseuse de ses consœurs et a ainsi contribué à faire reconnaitre et évoluer la place des femmes dans la profession, gagnant peu à peu le respect de tous. Avocate de la communauté espagnole exilée de Toulouse et fervente catholique, Marguerite Dilhan mène de nombreux combats pour la justice sociale et n’hésite pas à s’engager dans des associations de bienfaisance. Présidente de la Ligue contre la tuberculose infantile et fondatrice de la section toulousaine de « la Goutte de lait », organisation destinée à distribuer du lait stérilisé aux mères qui ne peuvent allaiter, elle est particulièrement engagée pour la cause de l’enfance vulnérable.

1902 : Licenciée de droit, elle prête serment à l'âge de 27 ans ce qui fait d’elle la première avocate de France à avoir un cabinet. Elle exercera la profession pendant plus de cinquante ans.

1903 : Elle est la première avocate de France à plaider aux cours d'assises, dans une affaire de meurtre largement suivie par les journaux de l'époque. D’abord réduite à son statut de femme, dont la tenue et le physique sont commentés, la presse rapporte finalement qu'elle reçut les félicitations du Président pour sa plaidoirie. Elle plaide désormais devant toutes les juridictions y compris devant les Conseils de guerre pendant la Première Guerre mondiale.

1920 : Femme de convictions et devant le peu de considération de ses confrères, elle monte régulièrement à Paris pour défendre avec d’autres consœurs la place des femmes dans la profession.

1933 : Elle reçoit les insignes de chevalière de la légion d’honneur, avant d’être élevée au grade d’officière 16 ans plus tard.

1939 – 1945 : Durant la Seconde Guerre mondiale, dans le sillage de monseigneur Saliège, elle s’implique avec ferveur dans des actions de résistance en cachant des enfants juifs.

« Complimentée au nom du barreau toulousain par l’avocat qui prit la parole en faveur de Dumas, la jeune avocate dont la plaidoirie d’une belle forme philosophique et littéraire a produit la meilleure impression et a reçu aussi les félicitations de la cour, Mme Dilhan est la première femme en France qui ait plaidé devant un jury d’assises » Extrait du journal « Le matin » du 28.11.1903

MARTHE CONDAT (1886-1939)

Première agrégée de médecine

Marthe Condat, née en 1886 à Graulhet, est une figure éminente du monde universitaire scientifique toulousain. Première femme agrégée de médecine en France, elle mettra sa vie au profit de sa patientèle, de la recherche et de l’enseignement. Spécialisée en médecine des enfants, elle finira par occuper la chaire de clinique infantile et de puériculture. Malgré un parcours exemplaire, Marthe Condat, brillante scientifique, ne fait pas exception à la condition des femmes de son époque et pendant des décennies sa mémoire sera insuffisamment saluée. Elle s’éteindra prématurément, à l’âge de 53 ans, d’une tuberculose pulmonaire.

1903 : Après avoir rejoint sa sœur Honorine à Toulouse, Marthe Condat poursuit sa brillante scolarité à la pension des dames Lafont, rue des 36 ponts à Toulouse. Elle obtient deux baccalauréats ès-lettres et lettres et mathématiques avec mention.

1907 : Marthe Condat entame un parcours universitaire d’exception et intègre la faculté de médecine de Paris. Elle sera la 12ème femme en France à obtenir le titre prestigieux d’interne aux hôpitaux de Paris. Durant ces années d’internat, elle se spécialise en médecine des enfants.

1914 : alors que la première guerre est déclarée, elle reprend du service bénévolement pendant 5 ans pour pallier l'absence de personnel masculin et permettre le fonctionnement normal de l'hôpital des enfants malades.

1920 : Elle retourne à Toulouse comme cheffe de laboratoire au service des enfants malades du Professeur Morel.

1923 : Marthe Condat est la première femme agrégée de médecine en France et enseigne la pathologie médicale dans la Ville rose tout en publiant des travaux consacrés à la pédiatrie.

1932 : elle est la première femme à occuper la chaire de thérapeutique pour occuper 4 ans plus tard, celle de clinique infantile et de puériculture. Tout en assurant son enseignement, Marthe Condat continue à publier un grand nombre d’articles scientifiques, à recevoir de nombreux malades en consultation et à participer à de nombreux congrès.

« Nous nous sommes appliqués à étudier parallèlement et comparativement ces deux ordres de faits : leucocytes et fragilité leucocytaire et avons essayé d’en marquer les relations. Nos recherches ont porté sur des enfants de 2 à 15 ans, atteints d’affections diverses » Extrait de sa thèse de 1916 « Leucocytes et fragilités leucocytaires »

À propos de l’auteur des portraits

Gilles Sire est un illustrateur haut-garonnais. Il a notamment dessiné les portraits qui figurent au frontispice des collèges du département parmi lesquels figurent beaucoup de noms de femmes illustres.

" En dessinant leur visage, une évidence apparaît ; faire le portrait de Clémence Isaure ou celui d'Elisabeth Badinter ce n'est pas la même chose, le ressenti est différent, la proximité change la perception. Connaitre une personne, même médiatiquement, impose une exigence supplémentaire. C'est pour cela que, quand le Conseil départemental m'a consulté pour réaliser les portraits de Haut-Garonnaises inspirantes, je me suis plongé dans leur histoire pour mieux les connaître. Au-delà de leur visage, j'ai rencontré des femmes remarquables." G. Sire