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Archéo-rando à la fosse 8 Evin-malmaison

Qui n'a jamais voulu se mettre dans la peau d'un Indiana Jones des temps modernes et partir à la découverte de vestiges miniers? De comprendre comment s’organisait un quartier minier avec, notamment, le triptyque fosse-terril-cité? Cette archéo-rando à Evin-Malmaison vous permettra de découvrir les derniers vestiges de la fosse 8-8bis de la Société des Mines de Dourges et ses alentours.

Préparez votre sac à dos et enfilez vos chaussures de rando... c'est parti !

Avant de commencer, qu'est-ce que l'archéologie industrielle ?

" C’est dans le nord de l’Angleterre, berceau de l’industrie manufacturière et de l’économie capitaliste, que les premiers défenseurs des constructions industrielles obsolètes apparaissent à l’aube des années 1950. A la protection des édifices sont associées l’histoire des techniques et des machines, l’étude des luttes sociales et des crises économiques et la constitution d’une mémoire ouvrière. L’ensemble de ces préoccupations, qui prend appui sur les mutations de l’architecture et du territoire, constitue le champ pluridisciplinaire de l’archéologie industrielle.

En France, l’archéologie industrielle est plus tardive. C’est dans les années 1970, tandis que la désindustrialisation bat son plein, dans le nord de la France comme dans d’autres régions industrielles, que sont prises les premières mesures de protection. Cependant, dans le contexte traumatique des luttes sociales, de la montée du chômage et du déclin économique qui engendre honte et désarroi, l’archéologie industrielle demeure un combat de tous les instants devant l’empressement de Charbonnages de France à faire table rase du passé."

Définition proposée par Didier Vivien, maître de conférences à Lille 3 et photographe lors de l'exposition "Archéologie industrielle : Marcher - Photographier - Collectionner", créée avec Jean-Marie Minot, historien local et président de l'association ACCCUSTO SECI et accueillie en septembre 2019 au 9-9bis.

Qu’un édifice voué à la production et au travail puisse être considéré comme un bâtiment patrimonial au même titre qu’un château ou une église était une idée d’avant-garde à l’époque.

La création de la fosse

C’est en 1911 que la Société des Mines de Dourges, dans le but de développer son extraction, commence la préparation d’un nouveau siège, le huitième, à Evin-Malmaison. Celui-ci prend le nom d’un actionnaire, Emile Cornuault. Ce siège est destiné à mettre en exploitation les faisceaux de charbons demi-gras, quart gras et maigres, dans l’angle Nord-Est, encore inexploité, de la concession.

La Grande Guerre

En 1914, quelques mois avant le début de la Première Guerre mondiale, le puits n°8 est foncé jusqu'au futur étage de 355m, c'est-à-dire 305m au-dessous du niveau de la mer. Les travaux sont stoppés par le début de la guerre et reprennent en 1921.

Le 3 novembre 1923, de la houille est découverte par les équipes de fonçage du puits, à une profondeur de 162m. Le puits 8bis est commencé en 1923 et la fosse commence à extraire un an après. En 1925, la fosse 8 emploie 535 ouvriers, 392 pour le fond et 143 pour le jour.

De ce puits 8, il ne reste aujourd'hui que la plaque d'entrée avec à ses côtés, un cartouche rappelant les dates de création et de fermeture.

Le chevalement du puits 8

La Société des Mines de Dourges est nationalisée en 1946 et la fosse n°8-8bis intègre le Groupe d'Oignies. Elle cesse d'extraire en 1961 suite à la mise en service de la fosse n°10 du même groupe. Elle est alors utilisée pour la circulation du personnel et du matériel jusqu’en 1971. La fosse ferme en 1973 mais les puits servent d’aérage et d’exhaure pour le siège de concentration du 10 d’Oignies. La fosse n°8-8bis n'est plus utilisée que pour la remontée des schistes et l'exhaure, et ce jusqu'en 1991. Cette année-là, le chevalement du 8 est mis hors service, les câbles sont démontés et le puits est remblayé en mai. Le chevalement du 8bis est abattu le 27 novembre 1991.

Le chevalement du puits n°8 est remplacé par le chevalement post-Nationalisation du puits n°3ter de la fosse n°3-3bis - 3ter des Mines de Marles à Auchel. Plus performant, il permet également de descendre plus profondément dans le sous-sol. Ce chevalement est un chevalement métallique équipé de 2 molettes superposées de 6,50m de diamètre. Ancien chevalement du puits n°3ter du groupe d’Auchel, les Houillères du Bassin minier Nord-Pas de Calais (HBNPC) l’ont démonté et transporté sur le carreau de la fosse 8 d’Évin-Malmaison où il a été entièrement reconstruit.

Dernier vestige du puits 8, le chevalement rouge d'Evin marque résolument le paysage.

Le chevalement, d’une hauteur de 42 mètres et d’un poids estimé à 190 tonnes, a été entretenu par les Houillères jusqu’en 1990. Le chevalement 8 est menacé lui aussi de destruction et est sauvé en 2002 grâce à l’association « le 8 d’Evin » et remis en état grâce au concours de la Communauté d'agglomération Hénin-Carvin (CAHC) et de l’établissement public foncier.

Le chevalement a été classé au titre des Monuments historiques le 25 novembre 2009.

D'autres vestiges de la fosse 8-8bis

Ce chevalement rouge marque aujourd'hui résolument le paysage mais à ces pieds se dissimulent d'autres vestiges quand on sait où regarder. Ouvrez l'oeil, c'est parti !

Son petit frère a aujourd'hui disparu mais il reste aujourd'hui la plaque d'entrée du puits 8bis.

Les derniers vestiges de la fosse 8bis.

Lieu important pour récupérer sa quinzaine, la salle de paie (mais pas que !) est encore visible aujourd'hui. Kévin nous explique...

Non loin de là, des carreaux de carrelage côtoient un tapis de mousse. Il s'agit du sol de l'ancienne salle des douches de la fosse. Si vous fermez les yeux, imaginez cette salle des douches, appelées aussi salle des pendus ; au plafond, de multiples bleus de travail et habits de ville suspendus aux crochets. Un lieu incontournable à la mine !

Les derniers carreaux de carrelage de la salle des douches.
Le terril aujourd'hui, un écrin de verdure

Le terril de la fosse 8-8bis

Avant d'en connaître un peu plus sur le terril d'Evin-Malmaison, révisons un peu nos connaissances ! Un terril est un amoncellement de roches stériles et de déchets qui, remontés avec le charbon, étaient triés en surface. Dans la plupart des cas, il s’agit d’un mélange de schistes (ancienne argile chargée d’éléments organiques qui se séparent en feuillets) et de grès carbonifères (blocs compacts très durs). La proportion de schistes est d’environ 70%, mais peut descendre exceptionnellement jusqu’à 50% sur certains terrils. S’ajoute à ces principaux éléments une proportion variable de charbon qui diminue au fur et à mesure que les techniques d’extraction et de tri se modernisent.

Les terrils et cavaliers miniers d'hier et d'aujourd'hui.

Edifiés au sud et à l'est de la fosse 8-8bis, les terrils n°109, 113 et 113A sont toujours présents mais ont été aménagés. Difficile d'imaginer aujourd'hui que le terril conique principal s'étendait à la place de cette grande étendue de verdure et jusqu'au pied de la Cité des Victoires.

Aujourd'hui, le terril a peut-être changé d'aspect tout comme les anciens cavaliers miniers qui permettaient d'assurer le transport du charbon et des schistes, mais ils sont devenus des lieux de randonnées. Depuis quelques années, la création de la "Boucle des trois cavaliers" emmène randonneurs et cyclistes sur 22kms à la découverte du patrimoine minier et naturel d'Auby, Ostricourt, Dourges, Leforest, Oignies et Evin-Malmaison. Une autre manière de revenir sur ces lieux chargés d'Histoire !

Ces panneaux jalonnent les 22kms de cette boucle.
La vie dans les cités

La cité Cornuault

L’évolution est également très importante en termes de population et de logements : en effet, la Société des Mines de Dourges veut loger et retenir son personnel. En 1925, elle construit la cité Cornault qui compte environ 450 habitations implantées au Nord-Ouest du territoire. Une partie des paysans deviennent mineurs mais les volontaires français ne suffisent pas pour l’exploitation. On fait alors appel à d'autres nationalités : Belges, Italiens, Polonais, etc. Le 15 mars 1931, la fosse d’Evin-Malmaison occupe 1286 mineurs (1081 pour le fond et 205 pour le jour).

La cité-jardin Cornuault fait face à la fosse 8.
Pour ne jamais oublier...

La stèle en hommage aux mineurs d'Evin

La stèle fut édifiée en 2005 par l’association « le 8 d’Évin » au coin de la cité des Victoires.

Le texte de la plaque a été écrit par M. Alain Rambeau, ancien président de l’association Le 8 d’Evin : « Gardons en mémoire, les hommes, les femmes et les galibots qui, au jour comme au fond, au prix d’un difficile labeur, ont œuvré, parfois au péril de leur vie, à la fosse 8 d’Evin-Malmaison. Puisse leur courage et la lueur de leur lampe guider les générations à venir. »

Stèle édifiée par l'association en 2005.

Née de la volonté de passionnés de la mine, qui ne voulaient pas voir disparaitre le chevalement de la fosse 8 gravement menacé, l'association a vu le jour en septembre 2001. Leur premier objectif : s'opposer à cette démolition et mettre en valeur les sites et les édifices miniers, témoins d'une importante activité professionnelle qui a participé à l'essor du pays et concerné plusieurs générations de gueules noires.

Dès 2002, l'association a mobilisé les décideurs et les élus locaux pour que ce site soit sauvegardé. Depuis les membres mettent tout en œuvre pour entretenir la mémoire et mettre en valeur toute la corporation des mineurs au travers de différentes célébrations comme la Sainte Barbe, des expositions et autres manifestations.

Conclusion

Grâce à la ténacité de certains élus locaux et à la vigilance du Ministère de la Culture, la passion des associations d’archéologues amateurs et le développement des institutions à vocation culturelle, le Bassin minier Nord-Pas-de-Calais présente aujourd’hui plusieurs sites remarquables, dont plus personne ne doute qu’il était juste de les sauver de la démolition.

Chacun de nous peut devenir archéologue industriel en s'aidant de cartes, de vues aériennes d'hier et d'aujourd'hui, de cartes postales et en puisant dans les nombreuses ressources papiers et numériques pour ainsi retrouver les dernières traces d'un passé minier d'une richesse trop souvent insoupçonnée.

En 2012, l’inscription du Bassin minier au patrimoine mondial de l’UNESCO est venue donner crédit à des années de ténacité pour convaincre de la valeur historique, culturelle et esthétique de ces installations industrielles.

A vous de chercher !

Prenez avec vous votre téléphone portable, cette visite virtuelle et partez à la recherche des vestiges miniers tel un archéologue industriel. Nul doute que vous serez étonné par la diversité des traces restantes !

  1. La salle de paie et les bureaux
  2. Le puits 8bis
  3. Le chevalement et le puits 8
  4. Le carrelage de l'ancienne salle des douches
  5. Chemin situé à l'emplacement de l'ancien cavalier minier
  6. Le terril
  7. En savoir plus sur l'UNESCO
  8. La Cité des Victoires
  9. La stèle aux mineurs
  10. La Cité Cornuault (flâner dans les rues Ravel, Cornuault, Bizet) et dans la cité des Employés

Bonne découverte !

Cette visite a été proposée par le Pôle Patrimoine du 9-9bis aidé de Kévin Kaliski, Président de l'association Le 8 d'Evin.

Created By
Le 9-9bis
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Credits:

©Le 8 d'Evin ©Le 9-9bis