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L'ESAT de L'Arche d'Aigrefoin Les ESAT de L'Arche - épisode 6

À Courcelle-sur-Yvette, au bout de la ligne B du RER, un petit chemin discret passe par la forêt et amène directement à une belle ferme fortifiée du 17e siècle, à Saint-Rémy-lès-Chevreuse. Depuis 1981, L'Arche d'Aigrefoin y est installée avec plusieurs foyers et un ESAT.

Aujourd'hui à l'ESAT, on compte 57 employés en situation de handicap mental, une douzaine d'encadrants, un volontaire en service civique et une quinzaine de bénévoles qui se relaient par demi-journées au long de la semaine.

1. Le jardin maraîcher

Emblématique d'Aigrefoin, le jardin maraîcher mobilise une quinzaine de travailleurs. Ils cultivent en plein champ et dans des serres (non chauffées) des tomates, aubergines, courgettes, poivrons, concombres, haricots, tomates-cerise...

Au jardin, on fait aussi pousser des fleurs et on s'entraîne au greffage pour obtenir des plants plus résistants et une meilleure production. Le tout, sans pesticide ni engrais.

Enfin... c'est sans compter sur les déchets verts fournis en interne (par les foyers et les ateliers) ou en externe (issus des chantiers extérieurs) qui deviennent compost ou paillage, et qui reviennent à la terre, en la nourrissant au passage !

Les fruits et légumes récoltés sont vendus tels quels - à la boutique, cf. plus bas - et aussi transformés ! En effet, la majorité de la production est concentrée sur l'été, pendant les vacances. Pour garder une activité toute l'année, l'ESAT transforme aussi ses fruits et légumes en confiture, bientôt en chutney, et aussi en conserves grâce à différents partenaires.

Radis, salades, tomates, aubergines, haricots, fraises...
Quelques uns des produits transformés issus du jardin maraîcher

2. Les Espaces verts

Cet atelier entretient les espaces verts de la communauté et des clients. 2 équipes de travailleurs - soit une quinzaine de personnes - vont travailler sur des chantiers extérieurs : elles assurent l'entretien de grandes propriétés privées ou d'entreprises locales.

Une 3e équipe est en train de se mettre en place, avec l'embauche d'un nouvel encadrant depuis septembre 2021. Pour l'instant, deux chantiers peuvent être effectués simultanément, voire un peu plus : certaines missions requérant moins de main d’œuvre sont assurées par un travailleur en autonomie.

Bio l'ESAT ? Pas (encore) officiellement, mais oui !

Depuis une petite dizaine d'années, l'ESAT a entamé une démarche vers une production plus écologique. Au départ de ce "virage écolo", l'inclusion. En effet, auparavant, certaines choses étaient réservées aux assistants : la conduite du tracteur, l'épandage des engrais ou des pesticides... Cela ne semblait pas très cohérent avec le projet de L'Arche qui se vit (aussi) à l'ESAT.

Alors exit le tracteur, ciao les pesticides, adiós les engrais (autres que le compost) ! L'ESAT a développé par exemple la culture sur butte, qui permet de ne plus recourir au labour et aussi de requérir moins d'effort pour les travailleurs qui n'ont plus à se baisser autant.

« Maintenant, à chaque proposition d'évolution, on se pose la question : "Est-ce que c'est dans l'intérêt des personnes ? De la terre ? Est-ce que ça fonctionne économiquement ?" Et souvent ça concorde ! »

Anne Lemant, responsable de l'ESAT

Pour l'instant, cette démarche n'est pas labellisée Agriculture biologique, parce qu'un tel label vient avec des contraintes : il faut des ressources humaines et financières pour l'obtenir puis un contrôle fin et des procédures précises pour s'assurer de "rester bio". Par exemple, les déchets verts provenant des propriétés privées ne pourraient pas servir d'engrais, à moins de pouvoir prouver que les terrains des clients ont été uniquement traités de façon biologique.

3. La sous-traitance

22 travailleurs, certains à temps partiel, exercent dans cet atelier qui a plusieurs activités. Le conditionnement, la plus connue, est pourtant en baisse d'activité avec le développement des échanges numériques. Néanmoins, 7 ou 8 clients réguliers permettent de maintenir l'activité - appréciée des travailleurs, notamment les plus fatigables. On peut citer notamment Pachamamaï, une marque de cosmétiques bio, Mecalectro, fabricant d'aimants et autres pièces mécaniques pour l'industrie, Growing Paper, entreprise qui vend des cartes à graines ou encore l'assureur Allianz.

L'atelier sous-traitance travaille à se diversifier : un atelier menuiserie a ouvert cet été, construisant des meubles en palettes, sur commande ou en vente à la boutique.

En interne, une activité cuisine fournit les foyers "en liaison chaude" pour le déjeuner, avec les produits du jardin maraîcher.

Enfin, les travailleurs de la sous-traitance assurent aussi l'entretien des locaux et des véhicules de la communauté.

4. L'artisanat

Ce petit atelier n'en est pas moins important pour Aigrefoin. 6 ou 7 travailleurs s'y relaient et produisent divers articles, en couture principalement, mais aussi des magnets, des bougies, de la poterie..., dans une logique de développement durable. Beaucoup d'objets gravitent autour de la dimension zéro déchet : couvercles en cire, sacs en chutes de tissu, emballages en tissus pour wraps et sandwichs...

Les jolis mouchoirs de l'atelier

Petit à petit, un certain nombre de contrats ont été conclus avec des entreprises, institutions ou associations souhaitant offrir des petits cadeaux à leurs clients ou leurs employés.

Bambouna présente les boucles d'oreilles de l'artisanat.

5. La boutique

La boutique, enfin, vend les produits de l'ESAT : les produits frais et transformés du jardin maraîcher, les articles de l'artisanat, ainsi que des productions d'autres communautés de L'Arche en France et dans le monde.

La boutique contribue ainsi à l'ouverture vers l'extérieur que vit l'ESAT et la communauté de manière générale. Les clients des espaces verts ou de l'artisanat, les partenaires ou encore les employés des entreprises accueillies pour des journées solidaires, deviennent souvent clients de la boutique. Elle permet alors de garder un lien simple.

Depuis le 1er confinement, la boutique existe aussi en ligne : https://boutiquearcheaigrefoin.company.site/.

En route vers l'autonomie

À l'origine, L'Arche d'Aigrefoin, c'est un ESAT et des foyers hébergeant les travailleurs. Depuis, un foyer de vie a été créé, d'abord pour accueillir les travailleurs âgés arrivés à l'âge de la retraite ; mais parmi les personnes en situation de handicap membres de la communauté, plus de 70 % travaillent à l'ESAT.

Tous les travailleurs ne vivent pas sur place : pour 22 internes, il y a 35 externes. Parmi ces derniers, certains arrivent de toute la région parisienne. Avec une heure de transport matin et soir, on ne peut qu'admirer leur motivation ! Sens du travail, reconnaissance des clients, liens avec les collègues... autant de raisons qui justifient l'attachement des travailleurs à leur activité.

Dans ce contexte, un enjeu que l'ESAT porte est leur accompagnement vers l'autonomie. Par exemple : un des travailleurs a le permis B, et ils seront bientôt deux ; l'ESAT a loué pour eux un véhicule électrique leur permettant de livrer les produits dans les environs. D'autres travailleurs peuvent être "mis à disposition" des entreprises : cette solution économiquement intéressante pour l'employeur peut être une transition vers le milieu ordinaire pour le travailleur. Ou tout au moins, une belle découverte de l'entreprise pour l'un et du handicap pour l'autre.

Depuis quelques temps, l'ESAT a mis en place, en lien avec le ministère de l’Éducation nationale, la reconnaissance d'acquis d'expériences. Le principe : le travailleur fait valider par l'État les compétences acquises dans le cadre de l'exercice de son métier. Cette démarche requiert un certain investissement : il s'agit de monter un dossier puis de passer devant un jury pour obtenir un diplôme ou une attestation de reconnaissance des acquis et des compétences. Pour certains, ce sera la première étape en vue de l'obtention d'un diplôme (un CAP par exemple).

Depuis les débuts de L'Arche d'Aigrefoin, le travail comme projet d'inclusion fait partie intégrante de l'ADN de la communauté. Une mission qui a encore de beaux jours devant elle.

© L’Arche en France – Octobre 2021